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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2016  >  No 10/11, 17 mai 2016  >  Non à la réduction de moitié de l’armée suisse [Imprimer]

Non à la réduction de moitié de l’armée suisse

Référendum contre le DEVA (Développement de l’armée)

par Marianne Wüthrich, docteur en droit

Au cours de la session de printemps, le Conseil national a rejeté la motion «Sortir du programme de l’OTAN ‹Partenariat pour la Paix› (PpP)» – alors que la Suisse neutre n’a vraiment pas à participer à des exercices de guerre de l’OTAN dirigés vers l’Est. En même temps, après de longs débats, le dit «Développement de l’armée (DEVA)» fut très clairement accepté lors du vote final du 18 mars par les deux Chambres fédérales (cf. Horizons et débats no 8 du 18/4/16).
Contre le DEVA un «Comité de citoyens pour notre sécurité – NON à la réduction de moitié de l’armée» soutenu par le «groupe Giardino» et d’autres groupes citoyens a lancé le référendum. Expiration du délai référendaire: 7 juillet 2016.
Les comités exigent le respect des piliers constitutionnels de la politique suisse de sécurité mais aussi d’une armée capable de protéger le territoire et la population de la Suisse.

«Si le DEVA devait être ‹réalisé› comme l’Armée XXI, la Suisse se retrouverait bientôt désarmée et ne pourrait plus remplir son devoir de neutralité armée. Des fantaisies de ‹sécurité grâce à la coopération internationale› n’y aideront en rien. Quel Etat étranger ou quelle organisation serait prête à aider une Suisse qui, malgré sa prospérité unique, n’est pas disposée à mettre à disposition de son armée suffisamment de moyens pour garantir sa propre sécurité?»

Carlo Jagmetti, docteur en droit, ancien ambassadeur suisse aux Etats-Unis, ancien lt col EMG, in: «Wohin steuert die schweizerische Sicherheitspolitik 2016?» in: Pro Militia no 1/2016

«Qu’y avait-il au début de ce ‹développement de l’armée›? Il est très important, de se le remémorer. Au début de ce ‹développement de l’armée›, il y avait le fait de sa réduction de moitié. Nous avons aujourd’hui une armée de 200'000 hommes, réserves inclues, et l’armée future aura encore 100'000 hommes – cela à une époque, où les menaces autour de nous augmentent et où d’autres Etats réagissent plutôt avec le renforcement de leurs armées.»

Ueli Maurer, conseiller fédéral, procès-verbal du Conseil national, session d’été 2015, 18 juin 2015

Armée de défense au lieu de recherche de compatibilité avec l’OTAN

Comment cela se fait-il que l’armée suisse n’ait pas seulement été réduite en plusieurs étapes au cours des dernières 25 ans, mais en même temps ait été totalement réorganisée? En effet, les Etats-Unis n’ont pas démantelé l’OTAN après la dissolution du bloc des pays de l’Est, mais ont au contraire profité du moment, pour non seulement – allant contre toutes promesses – intégrer les anciens pays du bloc de l’Est. Ils ont également incité les Etats européens neutres à participer au Partenariat pour la Paix (PpP). Les programmes PpP sont en vérité des stages d’exercices pour préparer les Etats membres à une adhésion à l’OTAN. Lorsque la population suisse a été informée de la participation de la Suisse à cette organisation, la chose avait déjà été manigancée et se trouvait en réalisation. Sous les conseillers fédéraux Adolf Ogi et Samuel Schmid, l’armée suisse a été réorganisée au fur et mesure pour devenir de plus en plus compatible avec les normes de l’OTAN, allant des commandos émis en anglais, des carburants jusqu’à l’équipement et l’armement. Etant donné que la participation au PpP exige également des exercices coûteux à l’étranger et la participation à des manœuvres de l’OTAN, le département est obligé d’économiser à l’intérieur du pays. En outre, on inculque aux Suisses depuis de longues années, que dans la «paisible» Europe d’aujourd’hui, notre pays n’a besoin que d’une petite armée notamment pour les interventions en cas de catastrophes. Compte tenu des flux migratoires croissants et du danger d’attaques terroristes – par exemple contre les infrastructures (aéroports, voies de transit routières ou ferroviaires) – cette ligne d’argumentation ne persuade guère.
Ce dont la population suisse a besoin et doit l’exiger, c’est une armée apte au combat et facile à mobiliser, assez grande et équipée de matériel de première qualité, pour protéger le pays et la population – et non pas une armée minimale, tributaire de l’OTAN.

Le peuple Suisse soutient la neutralité armée et une armée de défense

La neutralité armée et perpétuelle est particulièrement bien ancrée dans la toute grande majorité de la population suisse. Elle s’est développée et consolidée au cours des siècles, jusqu’à ce qu’au Congrès de Vienne de 1815 les grandes puissances européenne finalement acceptée par écrit comme partie importante d’un ordre européen de paix et de sécurité.
Selon le sondage annuel de la population suisse par l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), le principe de neutralité connaît une approbation impressionnante de plus de 90% de la population. Ainsi le sondage de 2015 montre «un soutien très élevé au sein de la population: 95% des Suisses se prononcent pour le maintien de la neutralité. […] L’approbation forte de la neutralité se retrouve dans toutes les catégories d’âge, tous les niveaux de formations et de revenus, dans les trois grandes régions linguistiques ainsi que dans tout l’échiquier politique et indépendamment du sexe.» (ETH Zürich. Sicherheit 2015, Aussen-, Sicherheits- und Verteidigunspolitische Meinungsbildung im Trend, p. 115)
En outre, à chaque votation populaire sur ce sujet au cours des dernières décennies, les citoyens se sont clairement prononcés pour le maintien d’une armée forte bien ancrée dans le peuple.

  • Lors de la votation populaire mémorable du 26 novembre 1989, les électeurs ont rejeté le projet du GSsA (Groupe pour une Suisse sans Armée) en faveur de l’abolition de l’armée,1 avec 64,4% des voix (avec une participation de record de 69%).
  • L’initiative «Economiser dans l’armée et la défense générale» a été rejetée le 26 novembre 2000 par 62,4% des voix.
  • Le 18 mai 2003, le peuple a approuvé par 76% des voix l’«Armée XXI» et s’est ainsi prononcé en faveur d’une armée avec 220'000 militaires.
  • L’initiative populaire fédérale «Pour la protection face à la violence des armes» a été lancée, sous prétexte que des centaines de suicides et de crimes seraient commis chaque année avec des armes à feu militaires (ce qui n’est pas confirmé, car les fusils d’assauts peuvent aussi être achetés en privé). L’initiative était une attaque contre la relation de confiance entre les citoyens (soldats) et Etat. En effet, chaque soldat ou officier suisse peut conserver son arme à la maison et il est très rare qu’une personne omette de prendre soin de son arme de façon responsable. Le 13 février 2011, 56,3% des électeurs se sont opposés à la suppression de cette réglementation. Le jour suivant le «Blick» titrait: «Les Suisses ne se laissent pas désarmer».
  • Le 21 septembre 2013, les électeurs ont rejeté par 73,2% des voix et dans tous les cantons l’initiative populaire fédérale «Oui à l’abrogation du service militaire obligatoire» de la GSsA. Il a donc une fois de plus soutenu l’armée de milice ancrée dans la population, à laquelle, en principe, chaque citoyen masculin devrait participer (cf. encadré: art. 59?Cst.).
  • Aujourd’hui, en 2016, des citoyens conscients de leur responsabilité demandent un référendum sur le DEVA, pour stopper le démantèlement de l’armée et exiger une armée défensive, étant, de par sa grandeur et son armement, en mesure d’accomplir toutes ses missions constitutionnelles.    •

1    Initiative populaire fédérale «Pour une Suisse sans armée et pour une politique globale de paix».

Mission constitutionnelle de l’armée

Art. 2 But

1    La Confédération suisse protège la liberté et les droits du peuple et elle assure l’indépendance et la sécurité du pays.

Art. 58 Armée

1    La Suisse a une armée. Celle-ci est organisée essentiellement selon le principe de l’armée de milice.
2    L’armée contribue à prévenir la guerre et à maintenir la paix; elle assure la défense du pays et de sa population. Elle apporte son soutien aux autorités civiles lorsqu’elles doivent faire face à une grave menace pesant sur la sécurité intérieure ou à d’autres situations d’exception. La loi peut prévoir d’autres tâches.
3    La mise sur pied de l’armée relève de la compétence de la Confédération.

Art. 59 Service militaire et service de remplacement

1    Tout homme de nationalité suisse est astreint au service militaire. La loi prévoit un service civil de remplacement.
2    Les Suissesses peuvent servir dans l’armée à titre volontaire.
3    Tout homme de nationalité suisse qui n’accomplit pas son service militaire ou son service de remplacement s’acquitte d’une taxe. Celle-ci est perçue par la Confédération et fixée et levée par les cantons.

Source: Extraits de la «Constitution fédérale de la Confédération suisse»