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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°37, 19 septembre 2011  >  De bons ingénieurs et techniciens pour la recherche scientifique de l'eau et sa technologie [Imprimer]

De bons ingénieurs et techniciens pour la recherche scientifique de l’eau et sa technologie

Le 75e anniversaire de l’Eawag

par Urs Knoblauch, Fruthwilen TG

Dans notre vie quotidienne nous utilisons tout naturellement de nombreuses technologies en rapport avec l’eau. Le fait qu’il y ait un long et prospère travail de beaucoup de scientifiques, d’ingénieurs et d’ouvriers qualifiés n’est guère connu. Les grands acquis de la civilisation et la fondation de notre Etat national ainsi que son orientation vers le bien commun en sont des exemples. Selon le mandat légal l’Institut fédéral pour l’aménagement, l’épuration et la protection des eaux (Eawag) cherche depuis 75 ans des solutions aux problèmes d’eau et a contribué beaucoup à «la recherche, l’instruction et la consultation» dans ce domaine.

Un aperçu de cette activité en rapport avec la santé publique, l’hygiène, la distribution de l’eau et la protection des eaux est donné ci-après par la publication en trois langues «Eclairages sur l’Eawag – 1936–2001» qui a été publiée lors de son jubilé. En l’occurrence on prend conscience de la nécessité d’une formation à fond à l’école sur tous les niveaux des sciences naturelles. Une pensée et une éducation logiques, systématiques et structurées doivent à nouveau devenir centrales à tous les niveaux et dans toutes les matières. Cela doit être en rapport avec la vie concrète et l’économie nationale, des préoccupations éthiques et sociales. Il est facile pour des enseignants motivés d’éveiller la motivation chez les élèves et les jeunes envers de tels métiers significatifs.

«Apprendre du passé, être actif aujourd’hui, prévoir pour demain»

La directrice actuelle de l’Eawag, Janet Hering, déclare dans l’introduction: «Si les premières activités de l’Eawag portaient surtout sur des questions d’hygiène et de santé publique, l’institut a peu à peu étendu son horizon à la lutte contre la pollution et à la protection des eaux et des écosystèmes aquatiques.» Les problèmes de pollution de l’eau causés par l’industrialisation ont pu être résolus en Suisse, de nouvelles tâches comme l’effet de la micropollution et des nano particules restent encore à résoudre, aussi avec des améliorations nécessaires dans les stations d’épuration. Dans les pays en voie de développement et pays émergents, d’immenses tâches doivent être abordées. «L’Eawag est aujourd’hui un institut de recherche de renommée internationale dans le domaine des sciences et technologies aquatiques» grâce à «un financement stable de la part des pouvoirs publics» et par les spécialistes excellents de l’EPF il faut dégager de nouvelles voies «pour maintenir notre niveau de confort et de bien-être tout en réduisant nos besoins en ressources et nos impacts environnementaux.» La protection des écosystèmes naturels en fait aussi partie. L’aperçu de l’histoire de l’Eawag montre comment les problèmes peuvent être résolus de manière raisonnable, responsable et scientifique dans un Etat de droit démocratique fonctionnant bien. Ainsi Barbara Haering, membre du Conseil des EPF et du Conseil européen de la recherche valorise les performances de l’Eawag:

«Ce qui a commencé en 1936 comme un simple ‹Service de conseil des EPF pour l’épuration des eaux et l’approvisionnement en eau potable› créé à l’initiative des milieux de la pêche, est devenu un centre de compétence national à rayonnement international dans le domaine de l’eau. L’Eawag allie avec brio recherche de pointe, formation, expertise et communication et montre ainsi que l’interdisciplinarité n’est pas un mot creux, mais peut être un atout décisif – pour la recherche, l’enseignement mais aussi la pratique.»

Dans les débuts de 1936 à 1946, les pionniers de l’Eawag étaient deux personnalités de la recherche, le professeur Willy von Gonzenbach de l’Institut d’hygiène de l’EPF Zurich et le professeur Eugen Meyer-Peter, directeur du Laboratoire d’hydraulique de l’EPF de Zurich (VAW). Un chimiste, un ingénieur et un biologiste faisaient partie de l’équipe.

De plein cœur et avec une grande compétence, ils ont beaucoup contribué au standard de l’approvisionnement en eau d’aujourd’hui.

«Beaucoup de villes suisses renouvelèrent totalement leur système d’adduction d’eau à la fin du XIXe siècle. Le captage des sources, la filtration sur sable et la désinfection au chlore à partir de 1910 enrayèrent alors les épidémies. Mais l’eau courante dans tous les ménages et les nouveaux équipements sanitaires comme les baignoires firent exploser la consommation d’eau. Les problèmes d’évacuation prirent de l’ampleur. A partir de 1920, la collecte séparée des matières fécales dans les tinettes fut remplacée par le tout-à-l’égout. Les problèmes d’hygiène publique dans les villes furent ainsi résolus de façon confortable mais la pollution bien visible des milieux aquatiques augmenta en flèche. En effet, les eaux usées étaient rejetées sans traitement ou presque dans les rivières. Les pêcheurs furent les premiers à protester contre la dégradation des cours d’eau bientôt suivis des géologues et des spécialistes des questions sanitaires. Ils demandèrent en 1933 à la Confédération d’engager des mesures contre la pollution croissante des eaux et de créer un service de conseil et de consultation pour le traitement des eaux usées.»

Même dans la période des années trente, un temps d’embarras social et politique, la population, les communes, les cantons et la Confédération ont pris en main les questions urgentes. Le principe de subsidiarité y a joué un rôle important: Sur le plan communal beaucoup de telles démarches ont été faites dans des «corporations des eaux» selon le principe des coopératives; et c’est seulement vingt ans plus tard que ces centrales de bases ont été unies sous la garde cantonale.

Les biographies des pionniers de la recherche de l’eau sont très intéressantes. C’étaient des personnalités et des scientifiques avec cœur et engagement pour le bien commun. Ainsi le professeur Willy von Gonzenbach, né en 1880, a étudié la médecine à Zurich et à Munich.

«C’est peut-être parce qu’il contracta alors la poliomyélite qu’il se battit toute sa vie pour la santé et l’hygiène publique. Son engagement dans de nombreux comités, notamment à la tête de la commission sur la tuberculose, dépassa largement le cadre de son mandat de professeur de l’EPFZ. De 1922 à 1947, il fut membre du Grand Conseil de la Ville, du Conseil communal et du Conseil cantonal de Zurich. Il reconnut très tôt le danger que représentait la pollution des lacs et rivières pour la nature et l’homme. Mais, visionnaire, il avait également pressenti des problèmes qui ne s’imposeraient que plus tard comme la pollution de l’air ou l’inversement de la pyramide des âges. Il milita pour l’assurance-maladie obligatoire et l’assurance-maternité.»

Après les années de guerre, la consommation d’énergie et de ressources a commencé à augmenter. A peine 10% de la population étaient reliés à une station d’épuration centrale en 1960. La jeune génération ne peut presque pas s’imaginer quel luxe de l’eau chaude courante, de l’eau potable ou une douche signifiaient pour les grands-parents. Un regard dans le monde, dans les pays pauvres ou sur les destructions causées par la folie des guerres, nous force à réfléchir et à réaliser une politique responsable.

Le 1er janvier 1946 le Service de conseil déjà fort de 24 personnes changea de statut pour devenir un institut associé à l’EPFZ, l’Institut fédéral pour l’aménagement, l’épuration et la protection des eaux (Eawag). Des départements d’hydrogéologie et de génie civil vinrent alors compléter les départements de chimie et de biologie. Le premier directeur de l’Eawag fut le chimiste et ornithologue engagé Ulrich A. Corti, qui occupa ces fonctions jusqu’en 1952. Le travail politique était primordial pour les scientifiques. Ainsi le professeur Otto Jaag (hydrobiologiste et expert en limnologie) comme chef de l’Eawag de 1952 à 1970 a marqué le développement exemplaire de la protection des eaux. Il s’est employé pour une conciliation des intérêts dans la réalisation d’un article de Constitution pour la protection de l’eau. Le peuple adopta cet article avec une majorité mémorable de 81,4% le 6 décembre 1953; en 1957 la loi correspondante sur la protection des eaux contre la pollution entrait en vigueur. C’est en grande partie au travail de sensibilisation d’Otto Jaag que l’on doit cet intérêt du peuple suisse pour la protection des eaux. En 1962, un nouvel article de subvention, en 1971 une nouvelle loi pour la construction de canalisations et de stations d’épuration entrèrent en vigueur. Une bonne partie de notre consommation journalière d’eau provient de l’eau plusieurs fois épurée et réutilisée. «En 1961 Otto Jaag organisa notamment avec le chef de Ciba, Robert Käppeli à Lucerne, une manifestation intitulée ‹La protection des eaux, le défi de notre génération›. Hans Erni en dessina l’affiche: ‹Sauvez les eaux›.»

La grande valeur des sciences naturelles et des ingénieurs pour le bien commun

«En 1955, Jaag compléta l’Institut d’un département de recherche sur les déchets, un rapport ayant été établi entre l’élimination des déchets et la pollution des eaux. A partir des années 1960, l’Eawag se consacra de plus en plus à sa mission de recherche. Des études fondamentales sur l’eutrophisation des lacs, le pouvoir auto-épurateur des cours d’eau et le dimensionnement des stations d’épuration biologiques virent alors le jour. Les disciplines scientifiques se virent renforcées lorsqu’en 1960, l’Eawag reprit le Laboratoire d’hydrobiologie de Kastanienbaum, au bord du lac des Quatre-Cantons.»

De 1970 à 1992, grâce à la recherche de base des sciences naturelles excellentes, les sciences écologiques ont pu être perfectionnées sous la direction du chimiste et professeur Werner Stumm de l’Eawag.

«Werner Stumm encouragea donc la prise en compte des aspects chimiques mais aussi géologiques, biologiques et écologiques des phénomènes et leur étude à tous les niveaux, partant de l’échelle microscopique jusqu’au niveau biogéochimique global. Il se demanda bientôt si les milieux aquatiques pouvaient être assainis par la seule construction ou amélioration des stations d’épuration. Il incita alors les chercheurs à la surveillance et l’étude des multiples substances sans cesse produites par l’industrie et intensifia la recherche de techniques analytiques appropriées. En 1975 parut, sur la base de travaux de l’Eawag la nouvelle Ordonnance sur le déversement des eaux usées qui fixait pour la première fois des objectifs quantifiables pour la qualité des eaux.»

Pendant les années 80, on réalisait la construction de la plupart des usines d’incinération des déchets. En 1985, on pouvait défendre l’utilisation de phosphates dans les lessives. D’autres pays suivaient l’exemple de la Suisse. L’Eawag faisait également un travail de pionnier quant aux effets dangereux des pesticides de l’agriculture sur les eaux souterraines. On élabora également des bases importantes au sujet de l’eau employée dans les centrales nucléaires et les usines chimiques. La recherche supplémentaire de critères éco-toxologiques mesurables et de standards, le renforcement de l’éducation et de la formation complémentaire, la consultation et l’introduction d’études post grade sur l’ouvrage d’hydraulique en colonie et la protection des eaux, et l’introduction d’un cycle d’études en sciences de l’environnement marquèrent la zone d’action pendant ces années.

Entre 1992 et 2004 le biochimiste Alexander J.B. Zehnder était à la direction de l’Eawag. «La loi sur les EPF venait d’être modifiée et l’Eawag devait devenir indépendant en 1993 tout comme les EPFZ et de Lausanne et les autres instituts du domaine, l’Empa, le WSL et le PSI.» Sous le directeur Zehnder, on reconnaissait également qu’il fallait inclure la sociologie dans la recherche de l’environnement, et en 1993 on introduisait une division d’écologie humaine. Après l’élection de Zehnder au conseil des EPF, son remplaçant Ueli Bundi fut en tête pendant les années 2004 jusqu’à 2007, puis Janet Hering prit la direction.

Jusqu’à présent, on fait des progrès considérables dans les domaines les plus variés. Les économies de frais et d’énergie y sont toujours au centre. Avec le développement des bactéries Anammox, on trouva la clé de l’assainissement: «Les chercheurs de l’Eawag ne sont pas les seuls à avoir travaillé sur le procédé Anammox. Mais alors que les sociétés privées essaient de faire breveter même les processus les plus naturels, l’institut de recherche du domaine des EPF cherche à transmettre son savoir au plus grand nombre. Car les ingénieurs et chercheurs impliqués sont unanimes: pour garantir la durabilité de l’assainissement, il faut que le procédé Anammox se généralise.»

Assumer la responsabilité pour l’avenir

Jusqu’à présent, on reprend 97% des eaux usées en Suisse. L’infrastructure des eaux usées en Suisse se compose de plus de 750 stations d’épuration et d’environ 87 000 kilomètres de canalisations. L’entretien, l’assainissement et la modernisation des stations ont besoin de grands investissements et font partie d’une vue globale de l’économie politique. Les communes, les cantons et la Confédération y ont leurs obligations. Martin Würsten président de l’Association suisse des professionnels de la protection des eaux (VSA) et responsable du Service de l’environnement du canton de Soleure dit: «La Suisse pratique une protection des eaux de haute qualité grâce à la collaboration fructueuse de tous les acteurs du secteur, allant des bureaux d’ingénieurs aux organismes de recherche en passant par les sociétés privées et les pouvoirs publics. L’amélioration permanente de notre système d’assainissement ne peut se faire que si la recherche est poursuivie à très haut niveau dans ce domaine et que le savoir acquis est transmis aux acteurs de terrain. Un rôle que l’Eawag remplit avec grand succès.»

A l’avenir, les solutions décentralisées deviendront plus importantes à côté des infrastructures des eaux centralisées. L’eau est l’aliment le plus important, c’est pourquoi la reconnaissance de la pollution et des risques sera décisive. Les autres domaines importants sont la responsabilité pour les lacs et les fleuves, la revitalisation des eaux de ruissellement, la prévention de la mort des poissons et le maintien de la biodiversité.

La recherche des eaux pour l’aide au développement

Les experts de l’Eawag et d’autres organisations pratiquent une aide au développement exemplaire dans la construction des infrastructures des eaux et de l’hygiène. «L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que deux millions d’enfants meurent chaque année de maladies diarrhéiques transmises par l’eau.» Ainsi la communauté civilisée mondiale prouve son incapacité. Si on renforçait la volonté politique, on pourrait résoudre ce problème brûlant au niveau mondial, mais aussi la famine et la pauvreté, en utilisant une partie de l’argent des coûts d’armement et de guerre. Avec des filtres de sable et de galet, et en coopération avec la population locale, les universités et les fournisseurs en eau, l’Eawag contribue à la santé de la population pauvre. Elle aide aussi dans les projets d’agriculture, les réservoirs d’eau, la construction des puits et des toilettes avec des projets de recyclage ou l’irrigation dosée et économe par gouttelettes. En visitant une station d’épuration actuelle, on en voit clairement le bénéfice et le chef-d’œuvre pour le bien-être général. Aujourd’hui, 2,4 milliards d’hommes doivent vivre sans gestion des eaux usées et des matières fécales, des guerres et des catastrophes détruisent souvent les infrastructures modestes qui sont en train de se développer. Pour d’innombrables gens des pays pauvres le système «Sodis», la désinfection solaire de l’eau dans des bouteilles en PET, est devenue une chance. L’eau polluée dans des bouteilles en PET simples peut devenir l’eau potable sous l’action du soleil. Une invention simple, mais géniale pour le bien des hommes. «Le projet de désinfection de l’eau par exposition aux rayons du soleil dans des bouteilles en PET est un projet phare du département Eau et assainissement dans les pays en développement. L’élimination systématique des germes pathogènes a été démontrée et le procédé a été optimisé en une méthode fiable appelée «Sodis» qui est aujourd’hui régulièrement utilisée par près de 3 millions de personnes dans trente pays.»

Encourageons, élevons et éduquons la nouvelle génération vers des développements orientés sur des solutions, un travail soigneux, une réflexion logique, systématique et raisonnable, des sciences naturelles et humaines, afin qu’elle puisse apporter sa contribution au bien-être général et à la paix mondiale au plan professionnel et citoyen.           •

La brochure illustrée de 95 pages peut être commandée gratuitement auprès d’EAWAG, CH-8600 Dübendorf, tél. +41(0)58 765 55 11; courriel: info(at)eawag.ch; site internet: www.eawag.ch