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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°18|19, 7 mai 2012  >  Le «Mécanisme européen de stabilité» (MES), une loi des pleins pouvoirs pour étrangler les Etats européens [Imprimer]

Le «Mécanisme européen de stabilité» (MES), une loi des pleins pouvoirs pour étrangler les Etats européens

L’«Association européenne de libre-échange» (AELE) pourrait être une alternative nécessaire et raisonnable

par René Roca, historien

L’«Association européenne de libre-échange» (AELE) a été fondée en 1960 par sept pays d’Europe de l’Ouest, dont la Suisse. Aujourd’hui, l’AELE a encore quatre membres, à savoir l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein. En fait, après la Seconde Guerre mondiale, les Etats européens voulaient mettre sur un fondement durable le développement économique à l’aide d’une grande zone de libre-échange, basée sur l’«Organisation européenne de coopération économique (OECE)». Cependant, les Etats-Unis ont miné les efforts européens. Ils voyaient les pays de l’Europe comme des «pions» dépendants, des vassaux, sur l’échiquier géostratégique. C’est sur cet arrière-plan que le Français Robert Schumann a construit avec le soutien des Etats-Unis – et avec un Jean Monnet agissant plutôt dans l’ombre –, parallèlement à l’OECE et plus tard à l’AELE, l’Union européenne (UE) d’aujourd’hui. Déjà avec le premier contrat, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA, appelée aussi Union minière), les six Etats fondateurs s’étaient placés sur un faux fondement, c’est-à-dire un fondement supranational. Une «haute autorité», approuvée et dirigée par les Etats-Unis, ont enlevé les droits souverains les plus importants aux divers Etats-nations. L’Union européenne est aujourd’hui une «association d’Etats» qui est tenue ensemble par divers accords. En dernier lieu, l’élite européenne a dicté avec le Traité de Lisbonne aux pays membres, sans discussion et sans vote des citoyens concernés, une sorte de «Constitution» qui doit maintenant être adaptée avec le «Mécanisme européen de stabilité» (MES). Le dernier reste de souveraineté est ainsi balayé dans les domaines financiers et de budget.
C’est ainsi que l’Union européenne veut résoudre la crise, mais elle ne fait qu’augmenter la pauvreté et la misère dans une mesure inconcevable. La «Maison européenne» beaucoup vantée, et construite dès le début sur du sable, s’écroulera complètement avec le MES car les derniers piliers démocratiques et fondés sur le droit s’effritent.
Au début, l’OECE était remplie de la volonté de ramener l’Europe, en ruine après la Seconde Guerre mondiale, sur la voie démocratique à l’aide du «pouvoir du droit». Ceci n’était cependant possible que sur le fondement du Droit naturel et en encourageant l’économie sociale de marché sur une base décentralisée et fédérale. Ce regroupement des forces fit naître la volonté mondiale d’en finir définitivement avec les idées totalitaires en Europe, à l’aide de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
L’AELE a tenté de suivre cette voie, en continuation du début fait par l’OECE. Elle était dès le début une zone de libre-échange conçue de façon purement économique et avait pour but principal l’élimination de barrières au commerce entre les Etats membres, sans velléités de politique d’hégémonie, en mettant au centre la coopération et la reconstruction pacifique.
Au Conseil de l’AELE, dont le siège principal se trouve à Genève, tous les Etats membres sont, jusqu’aujourd’hui, représentés de manière égale en droits avec une voix; les décisions sont adoptées à l’unanimité, cela signifie qu’on discute aussi longtemps qu’il faut, jusqu’à ce qu’une bonne solution pour tous soit trouvée. Cette procédure implique qu’on s’efforce de comprendre les autres positions et qu’on fasse preuve de la capacité de se développer, de faire des compromis corrects. La Convention de l’AELE ne contient pas la création d’instances ou de pouvoirs supranationaux. En conséquence, la construction institutionnelle de l’AELE est, comparée à l’UE, très simple et elle n’entraîne pas de grands frais.
Le Conseil de l’AELE et les pays membres ne poursuivent explicitement que des objectifs de politique économique, sans abandon de leur souveraineté nationale. Pour cette raison, ils ont toujours pu et peuvent encore renoncer à transmettre à des organes communs des compétences appartenant aux Etats individuels. Par étapes, les pays de l’AELE ont convenu de la réduction de leurs droits de douanes sur les marchandises industrielles. Ils ont expressément exclu les produits agricoles de la libre circulation des marchandises. Une politique agricole commune aurait contredit la structure fondamentale d’une association souple. Avec ces principes de base, l’AELE a eu beaucoup de succès. Elle n’a jamais voulu devenir une construction politique selon la «méthode Monnet» comme l’est devenue l’UE.
L’AELE existe encore et elle doit convaincre un certain nombre Etats de l’UE d’y adhérer pour pouvoir quand même encore réaliser au XXIe siècle la grande zone européenne de libre-échange. L’AELE pourrait être – en commun avec le Conseil de l’Europe – le fondement d’un nouveau contrat social européen. Tout spécialement dans la crise sociale et économique actuelle, l’AELE pourrait ainsi représenter un espoir pour les peuples européens de pouvoir vivre ensemble en paix et en liberté, au sein d’une Europe indépendante.    •