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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°14, 14 avril 2009  >  12 milliards des dollars contre la faim, des billions pour les banques [Imprimer]

12 milliards des dollars contre la faim, des billions pour les banques

Décisions contestables des pays riches

par Silvia Liebrich

La crise mondiale de l’économie met à mal la situation alimentaire dans de nombreux pays en voie de développement. Les organisations humanitaires et l’Organisation mondiale pour l’alimentation (FAO) avertissent que le nombre des personnes affamées pourrait bien, dans les mois à venir, nettement dépasser un milliard avant même que la crise ait atteint les pays pauvres dans toute son ampleur.
«Le danger est grand que nous allions vers une nouvelle crise de la faim déjà dans la seconde moitié de cette année», dit Marita Wiggerthale, membre d’Oxfam Allemagne, à la «Süddeutsche Zeitung». La FAO part même de l’affirmation selon laquelle un autre choc des prix des aliments pourrait avoir des conséquences beaucoup plus graves que le précédent.
«La crise alimentaire est loin d’être bannie, au contraire, elle reviendra, a récemment constaté Christopher Delgado, expert en agriculture à la Banque mondiale. Ce qui est surtout inquiétant, d’après lui, c’est le clivage qui s’élargit entre les prix valables sur le marché mondial pour le blé, le maïs et les autres aliments de base, et celui que les gens dans les pays pauvres devraient payer pour acheter les aliments sur place.
De nouvelles données issues de la FAO démontrent que les prix alimentaires ont à peine baissé dans de nombreux pays en voie de développement depuis qu’ils avaient atteint un niveau très élevé, au printemps dernier. En partie, les prix ont même augmenté. Et cela est vrai bien que les prix valables pour les matières premières agraires sur le marché mondial aient nettement baissé pendant les derniers douze mois.
En Amérique centrale, au Panama par exemple, le maïs coûtait en février 22% de plus qu’une année auparavant, bien que les notations valables aux Bourses des matières premières aient diminué de plus de 30% dans le même intervalle. En Afrique centrale, au Congo, le prix du riz importé a presque doublé, tandis que les notations dans le commerce international ont dérivé d’un tiers vers le bas. En Asie, aux Philippines, les consommateurs ont payé pour le riz un prix qui a augmenté de 20% par rapport au prix en février 2008. Cette comparaison est possible grâce à une machine de recherche sur Internet que la FAO publie, depuis quelques jours, sur son site Internet www.fao.org.
Les causes de la hausse des prix alimentaires sont multiples. D’après les experts de la FAO, un rôle décisif revient aux monnaies faibles de nombreux pays pauvres, qui, en comparaison avec le dollar, perdent continuellement de leur valeur. Cela rend les importations des aliments plus chères, parce que le commerce international des matières premières se fait à peu près exclusivement sur la base de la monnaie américaine. De plus, les prix des engrais ont augmenté considérablement. De mauvaises récoltes viennent s’y ajouter. Les pays les plus pauvres sont, en majorité, ceux qui souffrent particulièrement des conséquences du réchauffement de la planète. La sécheresse extrême et les inondations mettent en danger l’approvisionnement autarcique de la population et font augmenter la dépendance des importations.
Cette année déjà, nombre de pays pauvres n’auront éventuellement plus assez de réserves en devises pour payer les importations coûteuses des vivres. C’est pour cette raison que le chef de la Banque mondiale, Robert Zoellick, demande que les pays industrialisés présentent un fonds de crise spécial destiné aux pays en voie de développement, pour empêcher que «la crise financière ne de­vienne une crise économique, humaine et politique» qui aurait des conséquences désastreuses pour le monde entier.
Il y a un an, lors des rencontres des premiers chefs d’Etat, le problème de la faim était encore en priorité à leur agenda. Péniblement, la communauté des Etats est parvenue à créer un fonds d’aide qui s’élève à 12,3 milliards de dollars pour détourner la crise alimentaire – un montant minuscule face aux paquets d’aide financiers ficelés pour sauver l’économie mondiale à raison de plusieurs billions de dollars. D’après l’organisation humanitaire Oxfam, un pourcentage minuscule des sommes pro­mises auparavant a été réellement versé pour résoudre le problème alimentaire.     •

Source: Süddeutsche Zeitung du 26/3/09
(Traduction Horizons et débats)