Démocratie directe et obligations envers des accords internationauxRéflexions citoyennes à propos de la votation populaire du 9 février 2014par Marianne Wüthrich, docteur en droitC’est le propre de la démocratie directe qu’après une votation populaire quelques-uns ne sont pas contents du résultat. Chacun a le droit de l’exprimer. Ce qui est cependant assez inhabituel après la votation sur l’initiative contre l’immigration de masse du 9 février ce sont les déclarations ouvertement hostiles de certains milieux contre le système de démocratie directe de la Suisse. Les citoyens seraient responsables de la fin de la voie bilatérale, disent certains politiciens dans le pays. La libre circulation des personnes ne serait pas négociable, fait-on savoir de Bruxelles. Cependant la situation juridique est évidente et il n’y a aucune raison de produire de la nervosité. Ce qui est à l’ordre du jour – dans ce cas précis comme dans chaque autre – est en premier lieu la mise en œuvre des nouvelles dispositions constitutionnelles par le législateur. Les travaux préparatifs sont l’affaire du Conseil fédéral, c’est là-dessus qu’il doit se concentrer. Un éventuel changement d’un accord avec l’étranger c’est un pas qui suivra plus tard et le Conseil fédéral ne peut ni ne doit se prononcer là-dessus à l’heure actuelle. Lorsque des conseillers fédéraux particuliers font des déclarations publiques à l’étranger concernant des décisions du souverain suisse, ils doivent se limiter à expliquer aux gouvernements des pays voisins et à la Commission européenne le modèle suisse en le soutenant pleinement. Le 9 février, le peuple suisse a clairement dit oui à l’initiative contre l’immigration de masse. Lors d’une votation populaire sur le plan fédéral, cantonal ou communal une majorité simple est, en général, suffisante. Mais lorsqu’il s’agit d’une modification de la Constitution, il faut la double majorité en Suisse, soit la majorité du peuple et des cantons. La majorité des cantons a été clairement atteinte lors de la votation sur l’initiative contre l’immigration de masse: dans 14 ½ cantons la majorité s’est prononcée en faveur de l’initiative, seulement 8 ½ cantons se sont prononcés contre. A quel sujet, le peuple et les cantons ont-ils dit oui? Un vote en faveur de l’autodétermination et la souverainetéLe texte de l’initiative qui figurera comme nouvel article 121a dans la Constitution fédérale prescrit que la Suisse gère de nouveau de manière autonome l’immigration des étrangers en fixant des plafonds annuels et des contingents pour le permis de séjour des étrangers. Dans les plafonds, les frontaliers et les requérants d’asile sont compris. Les employeurs doivent de nouveau chercher tout d’abord les employés appropriés en Suisse («sous réserve du principe de priorité pour les Suissesses et les Suisses» – il va de soi qu’il s’agit de personnes résidant en Suisse et non pas de personnes de nationalité suisse). Des chiffres concrets ne sont exprès pas mentionnés dans le texte constitutionnel pour que le nombre de permis de séjour puisse varier selon la situation économique. Les détails seront réglés dans une loi fédérale et les accords internationaux doivent être renégociés et adaptés dans un délai de trois ans. De nouveaux accords internationaux contraires à ce texte constitutionnel ne doivent pas être conclus. Mise en œuvre et concrétisation du nouveau texte constitutionnel dans une loi fédéraleQuelles seront les prochaines étapes? Des traités internationaux entre Etats souverains peuvent être résiliés et/ou renégociésIl est évident que les droits de décision politiques de la population suisse au plan fédéral, cantonal et communal se réduiraient à des résidus inefficaces si la Suisse adhérait à l’UE. Déjà aujourd’hui des institutions de l’UE essaient, et malheureusement aussi maintes politiciens suisses, de nous faire croire qu’avec les accords bilatéraux conclus avec l’UE, la Suisse ne serait plus libre de prendre des décisions populaires qui contrediraient ces accords. D’après l’accord sur le libre échange des personnes, la Suisse a le droit de demander une modification de l’accordComme annoncé par le Conseil fédéral dans son communiqué de presse du 12 février 2014, les conseillers fédéraux Sommaruga, Schneider-Ammann et Burkhalter élaboreront un concept jusqu’à la fin juin 2014 et présenteront un projet de loi au Parlement, à la fin de l’année 2014. En parallèle, les départements des UE-turbo Sommaruga (DFJP) et Burkhalter (DFAE) veulent déjà organiser une réunion avec le «Comité mixte sur la libre circulation des personnes, Suisse-UE». Johann Schneider-Ammann du département fédéral de l’économie (DFE), qui d’après son affirmation au préalable de son élection au Conseil fédéral ne serait pas pour une adhésion de la Suisse à l’UE, est omis. Pour la mise en œuvre de l’initiative contre l’immigration de masse, il est cependant déterminant de savoir avec quelle attitude et quels objectifs le Conseil fédéral s’investit dans ce comité mixte. D’après l’accord sur la libre circulation des personnes de 1999, la Suisse a le droit de communiquer une modification dans sa législation intérieure et d’apporter une proposition pour la révision de cet accord:
Pourquoi donc ces prises de position intransigeantes de Bruxelles et les réactions excitées de quelques conseillers fédéraux suite à la votation populaire du 9 février? D’après les articles 17 et 18, la libre circulation des personnes peut bel et bien être négociée. Ou bien se pourrait-il qu’on n’entende, par «partie contractante» qui modifie sa législation interne et souhaite réviser l’accord, pas les deux côtés mais uniquement l’UE? Apparemment nous les Suisses comprenons autre chose en matière d’accord «bilatéral» que les seigneurs de Bruxelles – à savoir un accord entre deux Etats souverains ayant les mêmes droits et non pas un diktat unilatéral. La démocratie directe comme obstacle efficace contre l’adhésion de la Suisse à l’UEDans un «Appel européen» le Nomes (Nouveau mouvement européen Suisse) s’est soucié prétendûment de la «défense des droits de l’homme» des 1,8 millions d’étrangers en Suisse. En réalité, les personnes résidant actuellement en Suisse ne sont pas du tout le sujet de l’initiative populaire. Celui qui vit déjà ici n’immigrera pas à l’avenir, les restrictions futures ne les concernent donc pas. En outre, les contingents pour l’immigration sont déjà en vigueur actuellement pour les personnes en provenance d’Etats ne faisant pas partie de l’UE et pour les Etats de l’AELE, ce qui ne dérange apparemment pas le Nomes. ConclusionNous citoyens avons tout lieu de rester vigilants: avec la votation du 9 février nous avons une fois de plus confirmé notre volonté de rester un Etat souverain et indépendant. Nous ne permettrons pas que des membres de l’exécutif et leurs complices dans l’administration fédérale et des organisations telles que le Nomes – dont notamment les Conseillers fédéraux Berset et Burkhalter ont été membres avant leur élection – ne respectent pas la volonté du peuple. Le Conseil fédéral en tant que serviteur du peuple doit s’engager avec toute sa force et toute sa conviction pour le maintien de la démocratie directe et pour la mise en œuvre des décisions populaires sans réserve. S’il ne donne pas satisfaction dans cette tâche, il nous reste toujours le référendum facultatif contre la loi fédérale respective. • 1 Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d’une part et la Communauté européenne et ses Etats membres d’autre part sur la libre circulation des personnes, article 25, alinéa 3 et 4 Vàclav Klaus: «Il y va de la libert黫Pour moi, le résultat du vote ne signifie pas ‹Non à l’immigration›, mais: ‹Ralentissez l’immigration dans mon pays, s.v.p.› Ce message ne doit pas être mal compris. J’ai la ferme conviction que chaque pays a le droit de dire de telles choses. Les ‹multiculturalistes› irresponsables, les mondialistes et les ‹européistes› voient cela, bien sûr, différemment. Eh bien, ils se trompent. Nous ne devons pas soutenir les nouveaux ‹-istes› intolérants et collectivistes, qui visent à supprimer notre liberté. […] Vàclav Klaus, ancien président de la République tchèque, in: «Weltwoche» du 20/2/14
Peter Gauweiler: «La Suisse ne s’abolit pas»«Au cours de cette année 2014, très jeune encore, cette année toute fraîchement débutée, il y a eu deux événements qui ont échauffé à l’extrême les classes politiques de la République fédérale d’Allemagne, et que celle-ci, jusqu’à ce jour, n’arrive pas à s’expliquer. L’un des événements a été le référendum du 9 février 2014 en Suisse. L’autre a été la décision, au nom du Peuple, du Tribunal constitutionnel fédéral du 14 janvier 2014. Extrait du discours de Peter Gauweiler lors du «Aschermittwoch» politique de la CSU à Passau le 5 mars 2014. www.peter-gauweiler.de |