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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°22, 28 mai 2012  >  Créer la transparence dans le secteur de la santé [Imprimer]

Créer la transparence dans le secteur de la santé

Les coûts de la santé n’augmentent que modérément.

La Confédération doit assumer sa fonction de surveillance. Les économies réalisées dans le domaine des assurances complémentaires doivent profiter aux assurés.

Interview de Carlo Conti, nouveau président de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé

hd. Le nouveau président de la CDS et directeur de la santé du canton de Bâle-Ville constate qu’une entente sur les buts de la politique de la santé fait défaut. Il explique qu’il faut, de manière générale, davantage de transparence et de clarté concernant les coûts.

Monsieur le Conseiller d’Etat, vous allez prendre, le 1er janvier, la présidence de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS). Quels sont vos objectifs?

Il faut clarifier les compétences des cantons dans le secteur de la santé publique et renforcer l’axe entre la Confédération et les cantons. Etant donné l’importance accrue des facteurs de compétition et de marché, il faut clairement définir le rôle des régulateurs. Selon la Constitution, ce sont avant tout les cantons; mais il y a aussi des tâches qui incombent à la Confédération. Un des objectifs primordiaux est de définir plus rigoureusement cette répartition des rôles. Une deuxième préoccupation importante est la clarification des flux financiers du secteur de la santé. Personnellement, je souhaiterais attacher plus d’importance aux aspects économiques.

Qu’est-ce que vous entendez par «flux financiers»?

Le transfert croissant de la charge financière des contribuables aux assurés est malsain, d’autant plus que, selon l’OCDE, les charges financières directes des particuliers pour les prestations sanitaires non couvertes par l’assurance-maladie sont chez nous les plus élevées au monde. C’est pourquoi il faut agir de toute urgence dans le domaine des primes. Comme le progrès médico-technique crée un déplacement croissant des traitements stationnaires vers les traitements ambulatoires, les pouvoirs publics doivent s’engager financièrement également dans ce domaine.

Quelles autres carences fondamentales constatez-vous?

Nous manquons d’une concertation politique sur les objectifs de la politique sanitaire. Cela nécessiterait une clarification de la répartition des responsabilités entre la Confédération et les cantons. Puisque la santé publique s’oriente de plus en plus sur les principes de l’économie de marché, il faut créer une instance d’arbitrage qui puisse intervenir en tant que régulateur.

«Il est important de créer la transparence»

Voyez-vous plutôt les cantons ou la Confédération en première ligne?

La compétence constitutionnelle appartient aux cantons. Les systèmes centra­lisés dans le domaine de la santé publique ne fournissent pas de meilleures prestations. Au contraire, ils ont tendance à les ra­tionner. Or, notre population n’en veut pas. Mais il faut que les cantons collaborent davantage les uns avec les autres. 26 systèmes différents, cela ne répond plus aux besoins actuels. Il faut aller vers des régions responsables de la fourniture des soins.
Le 1er janvier prochain, le nouveau système de financement hospitalier entrera en vigueur. Les cantons prendront en charge environ 55% des coûts des traitements hospitaliers. Mais le risque d’une nouvelle hausse des coûts persiste.
Il faut tout d’abord constater qu’actuellement les coûts des traitements hospitaliers stagnent et que les coûts de l’ensemble du secteur sanitaire n’augmentent que modérément. Par contre, on assiste à la hausse des primes d’assurance-maladie car les coûts des traitements ambulatoires – financés uniquement par les primes – augmentent davantage que la moyenne.

Quels autres facteurs sont responsables de la hausse des primes?

Depuis peu, les coûts d’investissement des hôpitaux sont financés à hauteur de 45% par les assurances-maladie. Cela a fait augmenter les primes. Le Parlement en a décidé en connaissance de cause, mais on n’a pas informé les assurés de cette augmentation supplémentaire.

Y a-t-il encore d’autres reports de coûts au détriment des assurés?

Avec le libre choix de l’hôpital, le nouveau financement hospitalier élargit les prestations de l’assurance de base. Cela a pour effet le report des coûts de l’assurance complémentaire à l’assurance de base, ce qui entraîne une pression supplémentaire sur les primes de cette dernière. Dans une perspective globale, le nouveau financement hospitalier ne génère pourtant pas de coûts additionnels pour la santé publique.

Jusqu’à présent, les coûts d’investissement étaient assumés par les pouvoirs publics. Ceux-ci sont-ils en train de se débarrasser de ces coûts au détriment des assurés?

On assiste effectivement à un transfert des charges de financement. C’est juste, les budgets d’investissement des cantons diminuent et les coûts des assurances de base aug­mentent.

Il faudrait donc baisser les impôts.

Ce serait, en effet, une conséquence logique qu’on pourrait revendiquer au niveau politique. Les directrices et directeurs cantonaux de la santé préféreraient engager ces moyens financiers libérés au profit des assurés. C’est d’autant plus important que le nouveau financement hospitalier avec ses forfaits par cas aura pour conséquence que davantage de prestations hospitalières seront fournies de manière ambulatoire.

Cette évolution vers des primes de plus en plus élevées est-elle tenable à long terme?

Il faut que ce soit un but prioritaire d’ana­lyser le système de financement et notamment les reports de charges sur les assurés. Cette évolution grève avant tout et exagérément les budgets mensuels des jeunes familles de la classe moyenne. Il faut davantage de moyens tirés des recettes fiscales pour financer le système sanitaire dans sa totalité. Le changement doit pourtant se faire de façon financièrement tolérable pour les cantons, en réajustant la clé de répartition actuelle de 45% : 55%.
Les cantons auraient pu fixer leur participation au financement des traitements hospitaliers à un taux plus élevé. Il y avait pourtant une majorité qui restait en dessous des 55% fixés par la loi sur l’assurance-maladie.
Vous avez raison. Il n’y a pourtant pour les cantons aucun moyen de parvenir à un accord valable et contraignant avec les caisses-maladie de sorte que de nouveaux moyens provenant des recettes fiscales conduiront à une réduction des primes. Quand il s’agit de proposer leurs primes à la Confédération, les caisses ne font pas la distinction entre les coûts du secteur stationnaire et ceux du secteur ambulatoire. Leurs données ne sont pas transparentes. C’est pourquoi les cantons ne peuvent ni ne veulent dégager davantage de moyens tirés des recettes fiscales. Il faut arriver à un mécanisme transparent.

Profiterez-vous de votre présidence pour négocier avec les caisses-maladie une nouvelle répartition du financement?

Il est également dans l’intérêt des caisses-maladie de chercher des solutions pour arrêter la pression constante sur les primes, d’autant plus que globalement les coûts du système n’augmentent que modérément.

Vous venez de mentionner, entre autres, les reports des coûts de l’assurance complémentaire sur celle de base. On constate pourtant que les primes des assurances complémentaires n’ont pas baissé sensiblement en 2012. Où va l’argent? Qui en profite?

Ce sont les assurances. Elles n’ont pas baissé les primes des assurances complémentaires en conséquence. Toutefois des représentants des caisses me disent qu’elles ont fait preuve d’une certaine prudence. Elles veulent voir d’abord comment les choses évoluent pour ensuite examiner comment faire profiter les bénéficiaires d’assurances complémentaires de la baisse des primes. Certains assureurs les ont baissées un peu.

Les assurances complémentaires ne devront-elles pas faire profiter les assurés des économies réalisées l’année prochaine déjà?

Pour moi, cela n’a pas grande importance. Ce qu’il faut, c’est créer la transparence. J’attends des assureurs et aussi de la Confédération, qui doit renforcer sa fonction de surveillance, qu’on aboutisse à davantage de transparence de sorte que les économies réalisées dans le secteur des assurances complémentaires profitent aux assurés.

Est-ce un appel lancé à la Finma?

A l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, en effet, mais aussi à l’Office fédéral de la Santé publique (OFSP). Il faut considérer le gâteau tout entier. Il faut examiner parallèlement les évolutions des assurances de base et des assurances complémentaires.

Les médecins et le personnel soignant craignent que le nouveau financement hospitalier entraîne une baisse de qualité.

La population n’acceptera pas une baisse de qualité dans le secteur de la santé, ni des restrictions de l’accès aux nouveaux traitements et médicaments. Cela apparaît dans toutes les enquêtes et recherches. Les hôpitaux qui offrent des soins de moindre qualité auront des difficultés dans le nouveau système concurrentiel.

La concurrence exige la transparence; c’est elle qui permet de juger de la qualité. Que fera-t-on pour la promouvoir?

Les cantons devront se charger, à côté de leur rôle de régulateur, d’une nouvelle tâche, surtout dans le domaine de la qualité. Ils doivent définir des indicateurs de qualité, les évaluer et intervenir s’ils ne sont pas respectés.

«Les hôpitaux dont les prestations sont de moindre qualité auront des difficultés dans le nouveau système concurrentiel»

Avez-vous déjà formulé des directives pour l’année à venir?

Il y a l’Association nationale pour le développement de la qualité (ANQ). Dans différents cantons, le débat sur la qualité a été déclenché et des indicateurs ont été fixés. Le processus est en cours. J’ai l’idée que certains de ces indicateurs vont être fixés au niveau national.

Quelles mesures avez-vous prises à Bâle?

Avec les hôpitaux, les fournisseurs de prestations et les responsables des soins à domicile, nous avons défini quelques indicateurs.
Sur la base de la nouvelle Loi sur la santé publique, nous avons rédigé un Rapport sur l’offre sanitaire dont la première édition a été publiée. Nous publierons chaque année des données sur les flux financiers, les flux de patients et des aspects de la qualité également.

La durée des séjours hospitaliers baisse. Les cantons sont-ils préparés à garantir les soins médicaux après la sortie de l’hôpital?

La situation diffère selon les cantons. Dans certains cantons, on ne pense pas avoir de besoins supplémentaires en matière de soins transitoires, dans d’autres si. A Bâle, les institutions existantes devront suffire. Nous observerons pourtant le marché et nous y interviendrons si nécessaire.    •

Source: © Neue Zürcher Zeitung du 31/12/11
(Traduction Horizons et débats)

Pourquoi, en tant que patients, soutenons-nous le référendum contre le modèle de «Managed Care» et sommes-nous favorables à un accès libre aux centres de compétences au sein de réseaux de soins intégrés?
En tant qu’organe faîtier, la fédération patienten.ch représente avant tout les patients souffrant de maladies rares et chroniques. Le libre choix du médecin spécialiste ou d’une clinique spécialisée ayant leur confiance est essentiel pour le traitement de ces patients. Ils ne veulent pas passer par un généraliste – souvent dépassé par ces maladies mais qui va tout de même les suivre – pour finalement aboutir n’importe où. Les malades chroniques connaissent en règle générale parfaitement le traitement dont ils ont besoin et n’ont pas à être mis sous tutelle. Pour eux, le coordinateur idéal n’est pas le généraliste, mais le spécialiste. […]
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Source: Exposé à l’occasion de la Conférence de presse consacrée au référendum contre le modèle de Managed Care; www.pulsus.info
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