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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°12, 25 mars 2008  >  Plan en dix points visant à rétablir la paix en et avec l’Irak [Imprimer]

Plan en dix points visant à rétablir la paix en et avec l’Irak

Proposition de l’institut suédois «The Transnational Foundation for Peace and Future Research»

hd. Depuis le début de la guerre en Irak, des personnalités et associations se sont périodiquement demandées comment mettre fin à la guerre et mener le pays à la paix. Dans son ensemble, l’opinion publique n’en a que trop peu connaissance. Certains de ces plans ont été élaborés de façon détaillée et méritent d’être discutés soigneusement et largement. Nous présentons ici, dans ses grandes lignes, un plan en dix points formulé récemment, que le chef de l’institut suédois de la paix TFF établi à Lund, Jan Oberg, et le diplomate au service de l’ONU pendant de longues années qu’était Hans von Sponeck (Genève) ont élaboré avec Annabel McGoldrick (Sydney), Vicky Rossi (Jérusalem) et Annette Schiffmann (Heidelberg) pour mettre un terme à l’occupation de l’Irak par les Etats-Unis. Le texte complet en anglais se trouve sur le site Internet de l’institut suédois (www.transnational.org).

1.    Fin de l’occupation par retrait des troupes et mercenaires étrangers, ainsi que le démantèlement des bases militaires.
L’existence actuelle de groupements de résistance organisés en Irak est une conséquence directe de l’invasion de l’an 2003 et de l’occupation qui a suivi. Il en va de même des groupements terroristes tels qu’al Qaïda et al Qaïda en Mésopotamie. Les puis­sances occupantes ont provoqué une situation analogue à la guerre civile, opposant les uns aux autres divers groupements ethniques et sectes. Les conflits et la violence entre Irakiens – entre musulmans chiites et sunnites par exemple – n’auraient pas éclaté sans l’occupation et l’immixtion de l’extérieur. Les Irakiens de toutes les couches sociales sont convaincus que le retrait de troupes étran­gères mènerait plutôt à une réduction qu’à un nouvel accroissement de la violence.
La fin de l’occupation doit coïncider avec la fermeture de bases militaires, le retrait de soldats étrangers, de services privés de sécurité et de mercenaires ainsi qu’avec la réduction de l’ambassade des Etats-Unis. Ces entités sont l’incarnation de la puissance occupante et de l’intérêt qu’elle porte aux ressources énergétiques de l’Irak.

2.    Rétablissement et respect de la souveraineté irakienne et de son intégrité territoriale.
La simplification prévaut à propos de l’Irak. On prétend ainsi qu’il y a principalement trois groupements nettement différents les uns des autres: les Kurdes au Nord, les Sunnites au centre et les Chiites au Sud. Ce type de considération ne se contente pas de mélanger les appartenances ethniques et religieuses: il est tout simplement faux. Premièrement, les ­Kurdes sont en majorité des Sunnites. Deuxièmement, les Arabes et les Kurdes se sont traditionnellement mélangés dans la plupart des parties du pays. Avant l’invasion, environ un million de Kurdes vivaient à Bagdad et y formaient ainsi la plus forte concentration urbaine de leur ethnie.
La «théorie des trois groupements» a incité quelques étrangers à envisager de manière irresponsable le partage du pays en trois secteurs autonomes, voire complètement séparés l’un de l’autre. La contribution internationale au soutien du pays doit viser avant tout à aider l’Irak en tant qu’unité et non comme pays divisé en trois parties. Quoi qu’il en soit, la décision appartient aux Irakiens, qui trouveront un accord.

3.    Une mission pacifique dirigée par les ­Nations Unies
Si l’ONU entend convaincre comme partenaire, elle doit faire preuve de respect envers le peuple irakien. De plus, une mission de l’ONU fondée sur une large base doit conjuguer ses efforts avec ceux de la Ligue arabe, de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), du Conseil de coopération du Golfe (CCG), éventuellement de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’Union européenne (UE).
Il convient de souligner une fois de plus que les 26 millions de citoyens que compte l’Irak selon les estimations – y compris ceux qui vivent mieux et de manière plus sûre au Kurdistan irakien – souffrent à un point qui n’a pas son équivalent dans l’histoire moderne. A ce sujet, il faut rappeler les quelque deux millions d’expulsés à l’intérieur du pays et les quelque 2,5 millions de réfugiés dans d’autres Etats.

4.    Remise de dettes
45 Etats ont décidé d’annuler les dettes que l’Irak a contractées envers eux. Le montant total dépasse USD 140 milliards. Il s’agit d’un pas dans la bonne direction. La confirmation de l’annulation devrait avoir lieu bientôt.

5.    Dédommagement international en raison des sanctions, de l’invasion et de l’occupation
Les frais considérables que l’invasion et l’occupation causent aux Etats-Unis sont bien connus. En revanche, il n’y a pas d’estimation des coûts imputés à la société irakienne par les destructions physiques, mentales, sociales et culturelles. Il s’agit ici non de soutien humanitaire ni d’aide au développement, mais d’indemnités pour les conséquences de la guerre, de l’occupation et des sanctions. En 1991, le Conseil de sécurité des Nations Unies a rendu l’Irak responsable des destructions dues à son invasion du Koweït. Sur quoi la Commission d’indemnisation de l’ONU (CINA) est intervenue. Les gouvernements, entreprises et particuliers ont demandé des dommages-intérêts atteignant USD 350 milliards. 30% des fonds prévus pour des programmes humanitaires en Irak ont été affectés à la couverture de ces prétentions tandis que la mortalité infantile de ce pays atteignait son point culminant.

6.    Souveraineté sur les ressources ­pétrolières
L’Irak possède les plus grandes ressources pétrolières au monde. Une partie du processus de paix doit lui permettre de regagner sa pleine souveraineté sur ses res­sources pétrolières ainsi que les recettes qui en découleront. Il en résulte que tous les «traités» divergents que la «Coalition Provisional Authority» (autorité américaine d’occupation) a conclu sont nuls et non avenus.

7.    Le Proche-Orient, zone exempte d’armes de destruction massive
Il y a déjà longtemps que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale des Nations Unies ont insisté tous deux pour que le ­Proche-Orient soit une zone exempte d’armes et d’armes de destruction massive. Cette situation devrait s’appliquer à tous les pays du ­Proche- et Moyen-Orient, Israël compris, qui fait partie des puissances nucléaires depuis des décennies, et à d’autres pays, tel l’Iran, qui espèrent devenir une telle puissance. Il ne peut y avoir de paix dans la région tant qu’aucune réduction des exploitations d’armes de destruction massive, nucléaires et autres, n’a pas eu lieu.

8.    Processus de recherche de la vérité et de réconciliation
Dans les débats publics et les médias, la violence socio-psychologique dont souffrent des millions d’Irakiens est masquée par l’ampleur des destructions physiques. Non seulement ceux qui ont subi un dommage matériel, mais aussi les millions qui ont souffert psychiquement peuvent prétendre à un soutien au titre des droits de l’homme. Tout comme les autres pays qui ont subi des conflits par le passé, l’Irak aura besoin d’un processus social et de réglementations institutionnelles adéquates pour garantir que la vérité complète à propos de son histoire actuelle soit dévoilée et enregistrée.

9.    Coopération entre êtres humains
Les gouvernements ne sont pas en mesure, à eux seuls, de réparer les torts causés. Il est impérativement nécessaire que la coopération d’homme à homme devienne partie du processus de paix en Irak. Parmi les forces extérieures qui devraient travailler en Irak dès le début du nouveau type de missions dirigées par l’ONU, mentionnons les médecins, les infirmières, les travailleurs sociaux, les ingénieurs et les enseignants. Les jeunes Irakiens à qui les sanctions et l’invasion ont fait perdre de nombreuses années devraient recevoir des bourses d’études dans le pays et à l’étranger. Nombre de ces initiatives ne peuvent se développer que si la sécurité est assurée. Entre-temps, le recours aux moyens électroniques doit permettre de susciter la compréhension nécessaire.

10. Une solution globale pour toute la région
Actuellement, toutes les crises des divers éléments du Proche- et Moyen-Orient influent mutuellement les unes sur les autres; elles ne peuvent pas être résolues isolément. Les efforts déployés pour parvenir à la paix nécessiteront donc une conférence régionale permanente – sous la direction de l’ONU et de la Ligue arabe – à laquelle participeront tous les partis aux divers conflits, y compris les gouvernements, les organisations régionales et sociétés civiles, afin de discuter de la paix, de la sécurité et de l’évolution au Proche-Orient. Il faut insister sur la participation de tous à une telle conférence régionale. Aucun parti ne doit rester à l’écart.     •
(Traduction Horizons et débats)