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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°13, 6 avril 2009  >  L’argent gouvernemental et l’étalon-or dans le mouvement de réforme financière américain [Imprimer]

L’argent gouvernemental et l’étalon-or dans le mouvement de réforme financière américain

ww. La FED (Réserve fédérale américaine), sa fondation en 1913 et les efforts actuels pour la supprimer sont au cœur des ouv­rages de Griffin et de Brown. En outre, les auteurs exposent leur conception du système financier et justifient leurs propositions de réforme. Nous allons les résumer ici. Les idées de Griffin et de Brown sont ancrées dans l’histoire américaine. On peut distinguer trois tendances.

1.    Argent des banques centrales (banques d’émission)

Très tôt dans l’histoire américaine, des politiques ont cherché à créer, parallèlement aux banques, une banque centrale qui émet des billets et les met à la disposition des banques d’affaires et éventuellement du gouvernement moyennant intérêts. A leur tour, les banques d’affaires prêtent l’argent à leurs clients moyennant intérêts. Cette «monnaie de banque» peut être partiellement couverte par de l’or. Ce fut le cas aux Etats-Unis jusqu’en 1971. Ou bien, comme aujourd’hui, elle peut être créée sans couverture, à partir de rien, de manière quasi illimitée.
La banque centrale doit veiller à la stabilité de la monnaie en fournissant de l’argent aux banques, en soutenant leur politique commerciale et éventuellement – avec le gouvernement – ou bien jouer les sauve­teurs lorsqu’elles sont en difficulté (comme aujourd’hui). Ces idées se sont imposées lors de la fondation de la FED et elles imprègnent toujours le système financier dans le monde entier.

2.    Argent gouvernemental

Egalement tôt dans l’histoire américaine, certains politiques voulaient faire émettre de la monnaie aux collectivités locales, aux régions ou au gouvernement fédéral (qui représente la totalité du peuple américain). C’est la position d’Ellen Brown. Nous y reviendrons.

3.    «Monnaie citoyenne» (étalon-or classique)

L’étalon-or est parfois appelé «monnaie citoyenne» parce que ni l’Etat ni la banque centrale ne sont en principe nécessaires à son émission. Il suffit qu’une autorité de l’Etat définisse le poids de la monnaie en argent ou en or (et fabrique les pièces de monnaie dans un hôtel des monnaies). Ainsi, chaque banque privée d’une certaine importance peut émettre des billets de banque couverts à 100%. C’est la position défendue par Griffin.

L’argent gouvernemental

Comment Brown justifie-t-elle le principe de l’argent gouvernemental? «Le cartel des banques privées a mené le système au bord de l’effondrement. C’est pourquoi l’argent gouvernemental s’impose. Donner au Congrès le pouvoir de créer de l’argent peut libérer les générations futures du fardeau consistant à payer continuellement des intérêts à une élite d’oligarques financiers qui n’ont rien fait pour mériter cet argent.» (Brown, p. 465)
Le gouvernement et le Congrès créent de l’argent exempt de dettes et d’intérêts et le dépensent dans l’intérêt général. En contrepartie, l’impôt sur le revenu de l’Etat fédéral est aboli totalement ou en partie (il se monte aujourd’hui à 40% des revenus privés). Une banque centrale n’est donc pas nécessaire. On peut éviter l’inflation quand l’argent neuf correspond à une prestation. Dans ce système, il ne peut pas y avoir de faillite. Les banquiers deviennent des fonctionnaires de l’Etat. «Même si les politiciens responsables de notre politique financière s’avéraient aussi corrompus que les banquiers, la monnaie créée par le gouvernement serait en tout cas exempte de dettes.»

Comment pourvoir les citoyens en argent?

Un service bancaire communautaire ou gouvernemental accorderait des crédits sans intérêts également à des particuliers. Ceux-ci pourraient créer et toucher leur propre argent par l’intermédiaire d’une sorte de Chambre de compensation du crédit. «Les citoyennes et les citoyens deviendraient alors des émetteurs souverains de leur argent – en tant que collectivité et également à titre privé. Chacun peut décider lui-même combien d’argent il va retirer contre des garanties par l’intermédiaire du service en ligne qui opère et enregistre la transaction de crédit.»
Le remboursement s’effectue exactement comme aujourd’hui. Il y a des garanties et le remboursement est réalisé le cas échéant avec l’aide d’un office de recouvrement et de poursuites mais, à la différence de ce qui se passe actuellement, les crédits sont sans intérêts.

Qu’en est-il des dettes d’Etat?

Brown sait exactement comment amortir les considérables dettes d’Etat: Les emprunts d’Etat pourraient être complètement remboursés avec de l’argent public nouvellement créé (greenbacks). Le paiement des intérêts qui, actuellement, grèvent lourdement le budget serait immédiatement supprimé. Si les titres sont immédiatement anéantis, la masse monétaire ne changera absolument pas parce que les valeurs d’Etat sont considérées aujourd’hui également comme de la monnaie (monnaie M 3). Dans la masse monétaire, les valeurs d’Etats seraient simplement remplacées par des greenbacks. Même les nombreux étrangers qui possèdent aujourd’hui des valeurs d’Etat ne seraient pas lésés: ils auraient simplement des greenbacks à la place des valeurs d’Etat. Il n’y aurait donc pas d’inflation.
Ça a l’air très simple. Seulement des pays comme la Hongrie, la Grèce, l’Ukraine, la Lettonie ne peuvent pas imprimer de greenbacks pour échapper à la faillite imminente. Les Etats-Unis ont aujourd’hui une situation privilégiée. C’est le seul pays qui puisse rembourser avec sa propre monnaie les dettes qu’il a contractées dans le monde entier.

Aperçu historique

La proposition de mettre en circulation de l’argent gouvernemental sans intérêts a une longue tradition: Le premier ministre des Finances américain, George Hamilton, membre du gouvernement de George Washington (1798–1797), avait déjà un projet de cette sorte. On dit que Benjamin Franklin avait également une telle idée. Mais c’est Abraham Lincoln qui est devenu célèbre à ce propos. Il a émis des greenbacks – indépendamment des banques – pour financer la guerre civile (1861–1865). La guerre s’est achevée par une victoire pour l’Union et pour les greenbacks. Comme l’écrit Brown, il paraît que Lincoln avait le projet d’utiliser encore après la guerre les greenbacks comme monnaie gouvernementale sans intérêts. Il est évident que les grandes banques n’étaient pas d’accord. Certains pensent que c’est la raison pour laquelle Lincoln a été assassiné.
Le gouvernement suivant est revenu à la monnaie bancaire. Tous les citoyens n’ont pas accepté la démarche. Plusieurs partis ont été fondés qui tous voulaient réformer le système bancaire dans l’esprit de Lincoln. Les plus importants ont été le Populist Party et le Grennback Party. Dans les années 1930, le Populist Party est intervenu dans le débat: les grandes banques devaient être nationalisées et le gouvernement émettre sa propre monnaie. Le Congrès a adopté un article additionnel à la Constitution qui permettait cette mesure, mais on n’en est pas arrivé là. A la conférence de Bretton Woods, en 1944, Keynes proposa la création d’une monnaie internationale, le bancor, qui se rapprochait d’une monnaie gouvernementale. Mais on n’y donna pas suite.
L’idée d’une monnaie gouvernementale a eu des partisans également dans les grands partis. Selon Brown, John F. Kennedy aurait, peu avant d’être assassiné, laissé entendre dans un discours qu’il allait, sans banques ni FED, émettre de la monnaie sans intérêts.
Comme pour Lincoln, on soupçonne qu’il a été assassiné pour cette raison. Cette thèse, qui fait partie aujourd’hui de l’histoire des Etats-Unis, a été examinée dans plusieurs ouvrages sans qu’on ait pu apporter de preuve tout à fait convaincante. Comme celui de Lincoln, le successeur de Kennedy a pris ses distances à l’égard de la monnaie gouvernementale.

La faute aux populistes?

L’idée que le Congrès et le gouvernement émettent des billets de banque, utilisent cette monnaie dans l’intérêt général et suppriment la dette par-dessus le marché séduit par sa simplicité. Il n’y aurait ni intérêts ni remboursement. En contrepartie, on pourrait renoncer totalement ou partiellement à l’impôt sur le revenu. On comprend pourquoi les médias influencés par les grandes banques ont dénigré le Parti populiste. Peut-être est-ce là l’origine de la connotation péjorative du terme «populisme».

Monnaie alternative sans intérêts et monnaies complémentaires

Brown fait l’éloge des nombreuses monnaies alternatives et complémentaires qui ont été émises par des collectivités locales ou régionales aux Etats-Unis et ont renforcé la cohésion et favorisé le développement régional. Elle mentionne 31 monnaies locales ou régionales sans intérêts dont une partie date de l’époque de la colonisation.

Etalon-or: monnaie honnête et stable

De nombreux Américains comme Thomas Jefferson, Andrew Jackson se sont élevés avec force contre le papier-monnaie non couvert (ou partiellement couvert) mis en circulation par une banque centrale. A trois reprises, il a été possible de retirer leur concession aux banques centrales (qui faisaient cela). Thomas Jefferson, rédacteur de la Déclaration d’indépendance et futur président, a forgé l’expression d’«argent honnête et stable».
On a conservé un dialogue entre Thomas Jefferson et Alexander Hamilton. Le premier était ministre des Affaires étrangères et le second Ministre des Finances du premier gouvernement américain (1789–97):
Jefferson: «Une banque centrale privée qui émet de la monnaie est plus dangereuse pour la liberté des hommes qu’une armée permanente. Nous ne pouvons pas tolérer que nos leaders nous imposent des dettes perma­nentes.»
Hamilton: «Aucune société ne peut réussir si elle ne rend pas compatibles les intérêts et la fortune des citoyens riches avec ceux de l’Etat. […] Un endettement modéré peut être une bénédiction pour le pays.» (Griffin, p. 373)

Large soutien

Il existe aujourd’hui encore aux Etats-Unis un véritable mouvement populaire qui demande avec insistance une monnaie honnête et stable. Sa référence est Thomas Jefferson. Alan Greenspan a lui aussi longtemps défendu avec conviction la couverture-or comme étant le meilleur système. (Cela changea lorsqu’il fut nommé membre du directoire de J.P. Morgan puis président de la FED). Des économistes comme Ludwig von Mises, Murray Rothbard, Jörg Guido Hülsmann ont également confiance dans ce système. Dernièrement, le député au Congrès Ron Paul a proposé au Congrès d’abolir la FED (cf. Horizons et débats du…..…). Lui aussi fait partie de ce mouvement. On a donné aux partisans de l’argent honnête et stable le surnom de «gold bugs». Il remonte à l’époque de la fondation de la FED où ces personnes portaient au revers un insigne représentant un scarabée d’or.

Comment fonctionne l’étalon-or?

L’étalon-or classique fait correspondre l’or et la monnaie. La politique monétaire devient inutile et peu importe quelle quantité d’or, c’est-à-dire de monnaie, circule. Quand il n’y a pas assez de monnaie en circulation, le pouvoir d’achat augmente et les prix baissent. La baisse des prix n’est absolument pas un phénomène négatif car elle stimule la consommation. Le phénomène inverse est aussi valable: lorsqu’il y a trop d’or, c’est-à-dire de monnaie, en circulation, le pouvoir d’achat diminue et les prix montent. Mais ces fluctuations sont moins importantes et absolument pas comparables à celles causées par la politique monétaire actuelle. Avec l’étalon-or classique, il n’y a pas de fluctuations de l’or qui invitent à la spéculation. Ainsi, il serait absurde d’acheter de l’or avec de l’or. (Ce serait aussi absurde qu’acheter aujourd’hui un billet de cent dollars avec un billet de cent dollars.) L’étalon-or classique a vécu quelques décennies de stabilité et de calme relatifs avant 1914. Ainsi, en Suisse, la Confédération et les cantons n’étaient pratiquement pas endettés.
Griffin renvoie à l’école économique autrichienne qui a parfaitement mis en lumière le phénomène. Jörg Guido Hülsmann est récemment entré dans le débat avec son livre intitulé «Die Ethik der Geldproduktion». Il est professeur à l’université d’Angers et à l’Institut Ludwig von Mises d’Auburn, Alabama. Lui aussi demande ces jours-ci l’abolition des banques centrales. (Finanz und Wirtschaft du 18/3/2009)
A la fin de son livre, Griffin esquisse un nouvel ordre financier dans lequel le dollar est couvert à 100% par de l’or ou de l’argent et retrouve son ancienne solidité. Les considérables réserves d’or et d’argent que possèdent encore les Etats-Unis pourraient servir à cette fin. Il montre qu’une telle réforme monétaire (et le remboursement des dettes) pourrait être réalisée sans grandes difficultés. On ne devrait absolument pas renoncer aux moyens de paiement modernes comme les cartes de crédit et l’argent électronique. Si l’on s’appuyait sur le dollar-argent tel qu’il est défini dans la Constitution américaine, les citoyens américains devraient se réhabituer à ce qu’un déjeuner ne coûte que quelques cents.
Je vais maintenant évoquer certains sujets traités dans les deux livres qui nous permettront de préciser les différences entre Brown et Griffin: aperçu historique, controverse sur la crise des années 1930, problématique des intérêts et importance de la planche à billets pour les guerres.

Aperçu historique

Griffin attribue davantage d’importance que Brown à l’influence sur la politique de la haute finance anglo-saxonne (grandes banques) à visée globale. Celle-ci a eu une influence déterminante non seulement lors de la création de la FED. Elle continue de jouer un rôle décisif en politique selon la devise: Qui domine l’argent domine également la politique. Griffin décrit la politique financière des grandes banques - Rothschild, Rockefeller, J.P. Morgan, etc. Il montre comment elles ont encouragé les guerres en finançant les deux camps. Ainsi, lors de la Révolution russe, J.P. Morgan a soutenu financièrement aussi bien Lénine que ses adversaires, les mencheviks. Pourquoi? Pour pouvoir plus tard continuer de faire des affaires avec le vainqueur. Hitler a lui aussi été soutenu jusque pendant la Seconde Guerre mondiale par des banques américaines. Pendant la Première Guerre mondiale, J. P. Morgan avait intrigué pour que les Etats-Unis entrent en guerre (Affaire Lusitania). Il craignait qu’en cas de victoire allemande, l’Angleterre et la France ne puissent pas rembourser leurs dettes.
Griffin évoque également les activités d’organisations comme le Council of Foreign Relations (CFR). De telles organisations agissent en coulisses afin de chapeauter politiquement le monde financier international qui forme déjà un réseau serré. Griffin voit dans ce nouvel ordre mondial dirigiste qui se dessine de plus en plus nettement un danger pour la liberté des citoyens.

Controverse sur la crise des années 1930

Brown croit à la politique financière: une instance étatique doit réguler les flux financiers et les adapter aux besoins d’une économie en pleine croissance. Elle critique ainsi l’étalon-or qui, pour des raisons évidentes, ne peut guère réguler la masse monétaire. En effet, l’or doit être extrait à grand-peine de la terre. «Nous avons vu que l’or était trop rare et trop peu souple pour servir de masse monétaire au pays […].» (Brown, p. 464). Pour elle, l’étalon-or est responsable des crises financières et c’est dans cette perspective qu’elle analyse la crise financière des années 1930. C’est le manque d’argent disponible qui a déclenché la crise et entraîné la dépression. Ce n’est qu’après que Roosevelt eut doublé la masse monétaire que le chômage a pu être réduit de 17% à 0%. «Le pays a été sauvé de la dépression parce que l’économie a été relancée par les liquidités.» (Brown p. 191) Les explications de Brown sont empreintes de polémique contre l’étalon-or. Elle n’est pas seule de son avis.
Ajoutons ceci: ceux qui partagent son avis ne tiennent pas compte, consciemment ou inconsciemment, du fait que l’étalon-or classique n’a pas besoin de politique monétaire; il s’adapte autrement aux changements économiques (cf. ci-dessus).
Griffin explique différemment la crise économique des années 1930: ce n’est pas l’étalon-or (et l’insuffisance de la masse monétaire) qui est responsable de la crise. Sa cause principale réside plutôt dans le fait que l’étalon-or a été considérablement affaibli après la Première Guerre mondiale (Convention de Gênes de 1922). C’est ce qui, à l’époque déjà, a donné à la FED et aux autres banques centrales la possibilité de fournir à l’économie et à la finance beaucoup trop d’argent bon marché. Cela, ajouté aux mécanismes du système bancaire, a entraîné, comme aujourd’hui, un endettement insensé, l’euphorie des Bourses et finalement le krach. Le doublement de la masse monétaire opéré par la politique de Roosevelt n’a pas été si salutaire. La dette de l’Etat a considérablement augmenté. Le chômage était de 25% en 1933. En 1937, il était descendu à 15% pour remonter à 21% en 1938. Ce n’est qu’avec les préparatifs de guerre puis avec la guerre qu’il a complètement disparu (lorsque des millions de jeunes hommes ont reçu leur avis d’incorporation).

Planche à billets, guerre, impôts dissimulés

Brown justifie le fait que l’Etat finance la guerre en faisant fonctionner la planche à billets. Aussi Abraham Lincoln, qui avait procédé ainsi durant la guerre civile, occupe-t-il une place importante dans sa conception du monde. Toutefois, elle estime que la planche à billets ne doit pas être au service des banques mais de l’intérêt général.
Griffin est d’un autre avis. Il montre que la planche à billets incite à l’abus. Elle encourage les gouvernements à s’endetter et à mener des guerres. Le monde serait beaucoup plus pacifique si le gouvernement américain était obligé de se demander s’il y a suffisamment d’argent dans les caisses de l’Etat pour la guerre. Sans la planche à billets (et son équivalent électronique), les guerres récentes n’auraient pas été possibles.
A l’aide des chiffres de la Première Guerre mondiale, Griffin montre comment la planche à billets et l’inflation qui en a résulté aux Etats-Unis ont été l’équivalent d’un impôt: «Entre 1915 et 1920, la masse monétaire a doublé, passant de 20,6 à 39,8 milliards de dollars. Inversement, pendant la Première Guerre mondiale, le pouvoir d’achat a chuté de presque 50%. Autrement dit: les Américains ont, sans le savoir, versé environ la moitié de chaque dollar au gouvernement. Et cela naturellement, en plus des impôts. […] Cette augmentation considérable de la masse monétaire ne coûtait rien, mais les banques pouvaient exiger des intérêts. Le très ancien partenariat entre la politique et la finance avait rempli sa mission.» (Griffin, p. 297)

Intérêts

Brown et Griffin montrent l’importance du mécanisme des intérêts. Il permet aux avoirs bancaires d’atteindre au cours des décennies des sommes insoupçonnées. Mais pour les deux auteurs, ce mécanisme n’est pas le plus important. L’essentiel de leur critique porte sur le fait que l’on peut créer de l’argent comme par magie, le transformer en dettes qui se multiplient dans le système bancaire, qui doivent être totalement remboursées et pour lesquelles il faut payer des intérêts.
Pour Griffin, les intérêts sont tout à fait justifiés dans le prêt d’argent pour lequel il a fallu travailler, fournir une prestation. «Lors­que l’argent que nous empruntons a été acquis grâce au travail et au talent de quelqu’un, il est normal que l’on nous demande des intérêts.» (Griffin, p. 220) Ainsi les banques ne devraient prêter que l’argent qu’elles pos­sèdent vraiment.

Objectif commun

Sur certains points, les différences entre Brown et Griffin sont inconciliables (ce qui affaiblit certainement le mouvement réformateur) mais les deux auteurs se rejoignent dans leur demande d’abolition de la FED et dans leur critique de l’«argent des banques» Ainsi, ils sont tous les deux d’avis que depuis 1913, la FED a mené une politique financière catastrophique. Elle n’a pas rempli la mission que lui assignait la loi, c’est-à-dire maintenir la stabilité de l’ordre monétaire. En à peine 100 ans, le dollar a perdu 95% de sa valeur. L’endettement (de l’Etat et des citoyens) a explosé de sorte qu’aujourd’hui, tout le système est remis en cause. En outre, le développement actuel de l’économie est constamment ébranlé par des désordres et des crises.
Et last but not least: l’humanité a vécu un siècle extrêmement belliqueux dont la FED et d’autres banques centrales portent une lourde responsabilité. Le message de Brown et Griffin est clair: la question monétaire est hautement politique et ne doit pas être laissée aux politiques et aux banques centrales. L’ordre monétaire actuel n’est pas une donnée immuable. Il faut accepter l’idée que la FED a échoué et que nous devons créer du nouveau avec ce qui est encore utilisable.    •