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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2015  >  N° 26, 19 octobre 2015  >  La Suisse est-elle un Etat souverain? [Imprimer]

La Suisse est-elle un Etat souverain?

Réflexions concernant les élections fédérales

par Reinhard Koradi, président du «Komitee selbstbewusste freie Schweiz» [Comité pour une Suisse libre et sûre d’elle]

La Suisse, un Etat souverain? Pourquoi une telle interrogation? Tout simplement parce que notre souveraineté, notre liberté et notre indépendance sont fortement menacées.

La Suisse n’est pas une île, mais elle a des frontières

La Suisse, avec ses piliers fondamentaux d’indépendance, continue à exister. Ces piliers sont
•    la démocratie directe,
•    la neutralité armée et la capacité à se défendre,
•    la liberté et l’auto-responsabilité,
•    les structures décentralisées (autonomie communale et fédéralisme),
•    le système de milice,
•    nos valeurs,
•    un approvisionnement suffisant avec des aliments sains.
Cependant l’esprit du temps – ainsi que des interventions et des attaques de l’étranger dans et contre nos affaires intérieures ainsi que l’aspiration fréquente au pouvoir et la volonté de dominer de certains acteurs de notre propre pays – érode ces fondements d’une Suisse libre et indépendante. Ainsi, une certaine conseillère fédérale affirma: «La Suisse n’existe plus!»
Ni aujourd’hui ni demain, il y a lieu d’exprimer un ras-le-bol politique, voire de la résignation. Il se peut que nous vivions encore trop bien, mais les jalons pour notre avenir sont déja posés.
Le temps est mûr: réfléchissons donc sérieusement à la protection de nos propres intérêts – à mon avis existentiels – afin d’agir de manière adéquate.
Nous fermons bien nos portes d’entrée à clé. Souvent, nous installons des systèmes de sécurité ingénieux pour protéger notre vie et nos biens – pourquoi donc cette négligence inexcusable quant à la protection des frontières? Celles-ci ont diverses fonctions qu’on ne peut pas mettre hors service sans dommage.

Des greniers vides – un risque sécuritaire

Que se passerait-t-il, à votre avis, dans notre pays densément peuplé, si la population souffre de la faim, ou risque même de mourir?
Il faut prévoir des troubles sociaux et le gouvernement se trouvera sous une énorme pression – avec toutes les conséquences négatives pour la solidarité et la sécurité intérieures. La stabilité de notre pays, formant la base de la confiance, la sécurité sociale et la capacité à se défendre s’affaibliraient sérieusement au sein de notre pays. La pression croissante à l’intérieur du pays fera également monter la pression venant de l’extérieur. Celle-ci aura une dynamique insoupçonnée, surtout si nous sommes dépendants de l’aide de l’étranger. Celui qui souffre de la faim et lutte pour sa survie n’est guère en état de se battre pour l’indépendance et la liberté de son pays ou pour ses droits civiques.
Une situation d’approvisionnement sûre en denrées alimentaires est alors une condition fondamentale pour la viabilité d’une Suisse libre et indépendante! Cette sécurité ne peut être créée qu’au moyen d’une agriculture productrice intacte à l’intérieur du pays – une agriculture ayant une structure d’entreprises hétérogène et décentralisée, comme elle existe, au moins partiellement, encore aujourd’hui. La diversité des exploitations doit être obligatoirement accompagnée par des structures productrices décentralisées et une grande diversité des produits (production laitière, agriculture, cultures fruitières et maraichères etc.).
Les branches en amont et en aval (semences, engrais, machines agricoles, meunerie, transformation laitière, boulangeries, boucheries etc.) sont toutes aussi importantes.
Il est évident que nous ne pouvons pas atteindre un auto-approvisionnement à 100% du fait du nombre d’habitants et de la surface limitée des terres arables. C’est pourquoi la Suisse doit prendre des mesures efficaces pour remplir son mandat constitutionnel qui est la protection et la défense de la souveraineté du pays. Cela signifie entre autre la réalisation d’une stratégie politique visant un degré d’approvisionnement aussi élevé que possible grâce à la production locale et accessoirement la conclusion de contrats contenant des obligations de livraison résistantes aux crises avec des partenaires contractuels dignes de foi. (Suite aux expériences faites dans le passé, l’UE et les Etats-Unis ne peuvent pas être ces partenaires.)
Le Conseil fédéral et l’administration fédérale prennent cependant d’autres voies. Encouragé activement ou passivement par une majorité parlementaire, le Conseil fédéral soutient une politique agricole défavorisant fortement l’agriculture productive et poursuivant la restructuration de la branche. Quotidiennement disparaissent trois exploitations agricoles en Suisse. Quant il s’agit de l’approvisionnement du pays, nos conseillers fédéraux se tournent vers le soi-disant «marché libre».
Cela équivaut à un funambule débutant évoluant à haute altitude sur une corde raide sans dispositif de sécurité suffisant. Le «marché libre» nous dictera alors avec une certitude absolue ses conditions de livraison et ses prix – ce qui signifie en cas d’urgence «capitulation devant l’ennemi».
Des greniers bien remplis sont un instrument de pouvoir, mais uniquement pour celui qui les possède. L’Ancien Testament nous l’enseigne. Et les Etats-Unis entreprennent tout pour vider les greniers du reste du monde afin qu’ils puissent en tant que «nourriciers du monde» continuer à développer et maintenir leur position dominante unique.
Au moyen d’une politique agricole et d’approvisionnement raisonnable, adaptée aux intérêts étatiques et sécuritaires de la Suisse, nous avons l’opportunité de nous soustraire, au moins en partie, aux ambitions de pouvoir de l’étranger.

Le monde a changé

Nous vivons encore dans une «nostalgie des beaux-temps». Nos voisins sont tous de bons amis. Les Etats-Unis en tant que «puissance protectrice» protègerons notre pays de tout mal.
Nous aussi, nous avons en fait tout fait pour que nos bons amis gardent leur bonne humeur. Notre empressement à reprendre le droit étranger, l’élimination du secret bancaire, l’affaiblissement de la place financière et économique suisse, les paiements volontaires et l’offre généreuse pour résoudre les problèmes des réfugiés.

Beaucoup d’engagements sans aucune nécessité – que se passera-t-il quand nous serons réellement dans le besoin?

Aujourd’hui, il faut développer et défendre une position de force.
Nous ne sommes pas une grande puissance, mais nous avons suffisamment de valeurs et d’atouts en mains, qu’il suffit d’utiliser de manière stratégique (transversales alpines, château d’eau etc.).
Pourquoi ne pas se positionner sciemment en tant qu’Etat souverain? La Suisse, un porc-épic hérissé – pourquoi pas? Une politique extérieure autodéterminée et une politique économique et commerciale s’orientant, entre autre, vers la sécurité de l’approvisionnement en produits locaux la plus élevée possible au profit de la population font partie du porc-épic.
Cette sécurité ne peut être créée qu’avec une agriculture productive. Ce qui signifie la réécriture de la politique agricole suisse.
Les structures existantes doivent être maintenues et favorisées. La diversité des exploitations est la meilleure garantie pour une sécurité d’approvisionnement élevée est résistante aux crises. Le risque de concentration se cachant dans la centralisation doit être réduit à l’aide de réseaux de production et d’approvisionnement finement tissés.
Ce n’est pas pour rien que le Rapport mondiale sur l’agriculture (paru en 2008) recommande pour la lutte contre la faim et la pauvreté des structures de production et de distribution locales et régionales sur la base d’exploitations agricoles familiales. Celles-ci sont massivement supérieures à l’agriculture industrielle. Ce qui est valable pour les pays peu développés, est également valable pour la Suisse, quant il s’agit d’approvisionner sa propre population.
Nos paysans peuvent remplir les greniers s’ils ne sont plus entravés dans leur travail. L’écologie et le bien-être des animaux, d’accord – mais pas au point que ne rien faire soit plus rémunérateur que de produire. Les paiements directs doivent, comme à leur origine, compenser les manques de revenus des agriculteurs, suite aux prix des produits trop bas comparés au travail accompli. La prochaine étape serait alors de réfléchir sérieusement à l’importance des denrées alimentaires saines et naturelles.
Les manques d’approvisionnement peuvent être compensés par des accords interétatiques apportant des avantages aux deux partenaires contractuels. Il serait peut-être avantageux de se tourner plutôt vers l’Est que vers l’Ouest.
Les objectifs étatiques et sécuritaires doivent obtenir davantage de poids que les objectifs économiques. Ce n’est pas le libre accès aux marchés et le rendement maximal qui doivent obtenir la première priorité, mais la garantie d’existence pour notre pays. En d’autres termes: la politique doit revoir son approche et donner la priorité à la sécurité alimentaire plutôt qu’à la compétitivité et aux perspectives de croissance. Le cas échéant, la production locale doit être protégée contre les importations à prix cassés.
La liberté et l’indépendance, la neutralité armée et nos droits et devoirs démocratiques ne peuvent durer que si nous nous opposons de manière crédible et déterminée à tous les niveaux au processus de réduction de notre souveraineté.
Seule une Suisse souveraine peut répondre à ses valeurs et contribuer au bien de la communauté mondiale.     •