Un expert juridique auprès de l’ONU met en garde contre le contournement des parlements nationaux

Accord économique et commercial global entre l’UE et le Canada

Genève (24 juin 2016) – Le spécialiste des droits de l’homme Alfred de Zayas* a mis en garde ces derniers jours que tout plan de l’Union européenne de contourner les parlements nationaux pour faire passer des accords commerciaux controversés violerait les droits humanitaires et les normes internationales.
«Des accords commerciaux, préparés et négociés en secret sans les acteurs importants tels que les syndicats, les associations de consommateurs, les spécialistes de la santé et de l’environnement ainsi que les parlements, n’ont aucune légitimité», a déclaré le rapporteur spécial de l’ONU pour la promotion d’un ordre international démocratique et équitable.
L’appel d’Alfred de Zayas coïncide avec la publication de rapports selon lesquels la Commission européenne planifie de traiter les accords économiques et commerciaux globaux (CETA) avec le Canada comme une affaire «EU only». Dans ce cas, tous les parlements nationaux de l’UE seront exclus du processus de ratification des accords. Ceci est le résultat des discussions, menées par le rapporteur spécial avec divers acteurs de l’UE, sur la base de documents secrets récemment révélés et sur les derniers rapports parus dans les médias.
«Vu les nombreuses voix opposées s’élevant au sein des organisations de la société civile, il est urgent de mener un débat approfondi et transparent dans les parlements nationaux et d’organiser des référendums dans tous les pays concernés», a précisé Alfred de Zayas. «Refuser au public le droit de participer à ce débat important est antidémocratique et fait preuve d’un profond mépris envers la voix du peuple.»
Un sondage précédent demandé par la Commission européenne en 2014 a montré que 97% de la population de toute l’Europe étaient opposés à l’insertion d’une protection asymétrique des investissements dans l’accord pour un Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement (PTCI ou TTIP en anglais) entre les Etats-Unis et l’Union européenne. «Il en serait de même pour l’accord CETA, mais on n’a jamais mené une enquête à ce sujet», a insisté M. de Zayas.
A la lumière de la session du Conseil européen du 28 au 29 juin 2016, le rapporteur spécial a appelé les gouvernements à respecter leurs obligations en matière de droits de l’homme. «Le système des traités des droits de l’homme comporte des obligations impératives que les Etats doivent respecter», a déclaré le rapporteur spécial en se fondant sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention européenne des droits de l’homme, la Charte sociale européenne et la Convention américaine relative aux droits de l’homme.
«Dans l’éventualité d’un litige entre des accords commerciaux et des traités relatifs aux droits de l’homme ces derniers prévalent», a-t-il insisté. «Il est interdit aux Etats de conclure des accords, qui retardent, contournent, entravent ou rendent impossible l’accomplissement des obligations relative aux droits de l’homme.»
Le rapporteur spécial a constaté que ce n’est pas aux Etats de garantir des gains pour les investisseurs ou les groupes transnationaux mais de légiférer et de réglementer au bénéfice de l’intérêt public. «L’Etat ne peut se décharger lui-même de sa responsabilité de protéger la population en adoptant des mesures sanitaires et de protection de l’environnement et en garantissant la réglementation du travail et la sécurité alimentaire», a déclaré M. de Zayas.
«Des accords commerciaux ne devraient pas être ratifiés sans avoir préalablement effectué des études d’impact sur les droits de l’homme, la santé et l’environnement, ce qui n’a pas été fait dans le cas des accords CETA et PTCI», a précisé Alfred de Zayas. «La ratification des accords CETA et PTCI donnerait le signal de départ d’une ‹course vers le bas› dans le domaine des droits de l’homme et restreindrait sérieusement la marge de manœuvre des Etats. Cela va à l’encontre des objectifs et des principes de la Charte des Nations Unies et constituerait un obstacle sérieux pour atteindre l’objectif d’un ordre international démocratique et équitable», a conclu le rapporteur spécial de l’ONU.    •

Source: Bureau du Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme, www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=20174&LangID=E

(Traduction Horizons et débats)

*     Alfred de Zayas a été nommé en mai 2012 «Expert indépendant des Nations Unies pour la promotion d’un ordre international démocratique et équitable» pour le Conseil des droits de l’homme. Il est professeur de droit international à l’«Institut des hautes études internationales» de Genève. De plus amples informations sur: www.ohchr.org/FR/Issues/IntOrder/Pages/IEInternationalorderIndex.aspx
    Un expert indépendant est une personne relevant du mécanisme des procédures spéciales, nommée par le Conseil des droits de l’homme afin d’examiner et d’établir un rapport sur les situations d’un pays ou sur un thème spécifique des droits de l’homme. Cette position est honorifique et l’expert n’est pas considéré comme appartenant au personnel des Nations Unies. Il ne perçoit aucun salaire pour ce travail. Il est indépendant de tout gouvernement ou organisation et agit à titre personnel.

Le Premier ministre français Manuel Valls a clairement rejeté l’accord TTIP (ou TAFTA). Le 26 juin, il a déclaré lors d’une réunion à Belleville-sur-Mer: «Et moi, je vous le dis franchement, il ne peut pas y avoir de traité transatlantique», car cet accord «ne va pas dans le bon sens». Et Valls d’ajouter: «Si la France le veut, elle peut stopper l’accord de libre-échange TAFTA.» Cet accord «serait mauvais pour notre économie».

Source: Le Monde du 26/6/16

Une lettre d’Irlande

Chers amis britanniques,

Tout le monde applaudit les démocrates du Royaume-Uni qui préfèrent le «projet-espoir» au «projet-peur». Considérant l’Union européenne comme un monstre antidémocratique, les démocrates ont décidé de regagner l’indépendance politique britannique et la démocratie nationale.
Réjouissons-nous du malaise des eurocrates bruxellois et de leurs partisans dans chaque pays de l’UE […].
Les démocrates en République d’Irlande devraient maintenant tenter de retrouver l’indépendance de leur pays en suivant l’exemple du Royaume-Uni qui a quitté l’EU et la zone euro.
Quitter l’UE est le seul moyen légal permettant à l’Irlande de se détacher de la zone euro désastreuse – y adhérer a été la plus grande erreur que l’Etat irlandais ait jamais commis.
Deux tiers du commerce extérieur de l’Irlande a lieu hors des 19 Etats membres de la zone euro: deux tiers de leurs exportations et trois quarts de leurs importations. Il est essentiel que l’Irlande rédige une convention spéciale concernant ses échanges commerciaux avec le Royaume-Uni. Si, cependant, l’Irlande reste dans l’UE, c’est la Commission bruxelloise – pas un gouvernement irlandais indépendant – qui décide des conditions des échanges. En tout cas, les acteurs de l’actuel et du futur gouvernement irlandais, ont le même état d’esprit antinational et antidémocratique que les eurocrates.
Hier, le Parti travailliste a reçu la quittance lors du référendum pour son manque d’engagement en faveur de l’indépendance nationale britannique et de la démocratie. Si la gauche politique ne se porte pas garant de l’indépendance nationale, il est inévitable que l’aile droite le fera. C’est une leçon applicable universellement. C’est ce que l’Irlandais James Connolly a enseigné dans ses écrits et selon son exemple – le leader du Parti travailliste, un des signataires de la Proclamation de Pâques de 1916 [document de l’année 1916, dans lequel le gouvernement républicain provisoire avait annoncé le renoncement de l’Irlande au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande].
Les démocrates irlandais comprenant la question de l’UE, jettent aujourd’hui un regard méprisant sur ces hommes politiques […], qui ont participé honteusement aux campagnes de harcèlement, aux mensonges et ont misé sur la peur des simples citoyens du Royaume-Uni pour soutenir l’autre face du référendum.
L’acte de politique mondiale du rejet de l’UE par le peuple britannique encouragera les démocrates de tous les pays de l’UE – qu’ils soient de droite, de gauche ou du centre politique – à poursuivre la lutte contre la zone antidémocratique et réactionnaire de l’UE/euro pour la remplacer par une Europe avec des Etats-nationaux indépendants, démocratiques et coopérants.
L’UE est une construction dépassée, un vestige de la guerre froide. Il est inévitable qu’elle disparaisse et le plus tôt sera le mieux pour la démocratie nationale, pour un véritable bien-être des peuples en Europe, pour la paix et pour de bonnes relations internationales sur notre continent.
Nous transmettons nos meilleurs vœux de l’Irlande à tous les démocrates du Royaume-Uni essayant de réaliser, dans la période à venir, l’admirable décision d’hier.

Anthony Coughlan, directeur de la plateforme nationale «UE Research and Information Center», Dublin, 24/6/16

Cette lettre a été envoyée le 24 juin 2016 aux organisations et individus du site «UK-Leave».
(Traduction Horizons et débats)

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