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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°22, 2 juillet 2013  >  La Kirghizie – pays de l’espoir [Imprimer]

La Kirghizie – pays de l’espoir

Recherché – Wanted – Ricercato

Pour des raisons d’actualité urgentes, nous invitons les lecteurs de toutes nos éditions à comparer les deux photos ci-dessous, publiées le 21 juin dans la «Neue Zürcher Zeitung», avec le texte qui suit. Toute personne qui peut fournir des informations utiles à cet égard est priée de s’adresser en Suisse/Schweiz/Svizzera à la Police fédérale. La rédaction refuse de continuer à travailler avant que cette question urgente soit résolue. Sans clarification de la contradiction centrale, c’est une fois de plus la fausse personne qui sera envoyée à la mort ou tuée dans la circulation routière suite à une situation d’urgence («Emergency situation») avec le médicament (lingual) le plus récent. (La courbe cardiologique tendra très rapidement vers: 0.00/0.00.00.0.00.000.0
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Pour la recherche, il s’agit encore d’une question non résolue.

La rédaction

.....  «Vêtu d’une robe blanche fraîchement lavée et d’un bechmète ouatiné de couleur sombre, la tête couverte d’un fichu blanc, elle avance lentement sur le sentier qui traverse le champ moissonné. Elle est seule. L’été a vécu. La voix des hommes ne résonne plus dans les champs, les moissonneuses-batteuses ont disparu et les troupeaux ne sont pas encore venus sur les chaumes.
Par-delà la grand-route grise, très loin, la steppe d’automne fuit à perte de vue. Au-dessus, silencieux, campent en caravanes des nuages bleutés. Sans bruit, le vent se répand à travers champ, compte les tiges de la sparte et les herbes mortes, puis glisse vers la rivière. Cela sent l’herbe mouillée au premier givre du matin. La terre se repose après la moisson. Bientôt le mauvais temps sera là; des pluies sans fin, puis le premier duvet sur la terre et enfin, les tempêtes. Mais pour l’instant, tout encore est silencieux et paisible.
Rien ne doit la troubler. La voici s’arrête et qui regarde longuement autour d’elle de ses yeux éteints et vieillis.
– Bonjour, mon champ, dit-elle doucement.
– Bonjour, Tolgonaï. Tu es venue? Tu as encore vieilli, tes cheveux sont tout blancs. Tu t’appuies sur une canne.
– Oui, je vieillis. Une autre année s’est écoulée, et toi, mon champ, tu as porté une nouvelle moisson. Aujourd’hui c’est jour du Souvenir.
– Je sais. Je t’attendais, Tolgonaï. Mais te voici seule cette fois encore?
– Tu le vois; je suis toujours seule.
– Donc, tu ne lui as rien dit, Tolgonaï?
– Non, je n’ai pas osé.
– Crois-tu que personne ne se trahira, même sans le vouloir?
– Mais non, pourquoi? tôt ou tard il saura tout. Il est grand à présent, et il peut l’apprendre des autres. Mais pour moi, c’est toujours un petit enfant. J’ai peur, très peur de lui parler.
– Pourtant un homme doit connaître la vérité, Tolgonaï.
– Je sais. Seulement comment la lui dirai-je? Tout ce que je sais, tout ce que tu sais, toi, mon champ maternel, tout ce que les autres savent, lui seul l’ignore. Et lorsqu’il saura, que pensera-t-il, comment comprendra-t-il le passé? Son intelligence et son cœur le mèneront-ils à la vérité? Ce n’est encore qu’un gamin. Voilà pourquoi je me demande comment je dois agir pour qu’il ne tourne pas le dos à la vie, mais la regarde toujours en face.» […]............................ 
« […] Les hommes ne me laissèrent pas retourner à la maison, disant que j’étais leur hôte, et ils m’invitèrent à passer la nuit dans le champ. On me prépara un lit de paille. Et regardant le ciel cette nuit, il me semblait voir la Voie Lactée toute parsemée de paille fraîche et dorée, de grains éparpillés et de son. Vers ces hauts étoilés, à travers le Chemin du Semeur, pareil à un chant lointain, le convoi s’éloignait, emportant le martèlement des roues. Je m’endormis sous leur cadence qui s’évanouissait et songeai qu’aujourd’hui, un nouveau semeur était venu au monde. Qu’il vive longtemps, qu’il ait autant de grains que d’étoiles au ciel! A l’aube, je me levai, et pour ne pas déranger les moissonneurs, je m’en retournai au village.
Il y a longtemps que l’aube n’avait été aussi éclatante au-dessus des montagnes. Il y a longtemps que je n’avais entendu l’alouette chanter ainsi. Elle s’élevait de plus au plus haut dans le ciel clair et s’y accrocha en une petite boule grise; comme un cœur humain, inlassablement, elle palpitait, frémissait, et résonnait à l’infini à travers la steppe. «Regarde, notre alouette chante!» me disait un jour Souvankoul. Quel enchantement, nous possédions même notre alouette! Et toi aussi, mon alouette, tu es immortelle!
– O, mon champ bien-aimé, tu te reposes à présent, après la moisson. On n’entend plus ici de voix humaines; les voitures ne soulèvent plus la poussière des routes, on ne vois plus les moissonneuses-batteuses, et les troupeaux ne sont pas encore venus sur les chaumes. Tu as donné aux hommes tes fruits, et te voilà étendu comme une femme après ses couches. Tu vas te reposer jusqu’aux labours d’automne. En cet instant, nous sommes seuls ici, toi et moi. Tu connais toute ma vie. Aujourd’hui est jour du Souvenir, je me prosterne en mémoire de Souvankoul, Kacym, Macelbèk, Djaïnak et Alimane. Tant que je serai en vie, jamais je ne les oublierai. Un jour viendra où je raconterai tout à Janbolot. Si la nature l’a doué d’intelligence et de bonté, il comprendra. Mais comment faire avec les autres, avec tous les hommes qui vivent de par le monde? J’ai quelque chose à leur dire. Comment parvenir jusqu’au cœur de chacun d’eux?
Soleil qui brille dans le ciel, tu fais le tour de toute la terre, parle-leur, toi.
Nuage de pluie, répands-toi en averse claire au-dessus du monde, par chacune de tes gouttes, parle-leur!
Terre, mère-nourricière, tu nous tiens tous contre ton sein, tu nourris tous les hommes dans tous les coins du monde. Parle-leur, terre aimée, parle aux hommes!
– Non, Tolgonaï, c’est toi qui dois leur parler. Tu es femme. Tu es au-dessus de tout, plus sage que tout, tu es femme, eh bien, parle!
– Tu pars, Tolgonaï?
– Oui, je pars. Si je suis en vie, je reviendrai. Au revoir, mon champ.»
Ces deux extraits sont tirés du récit de l’écrivain kirghiz Tchinguiz Aïtmatov, «Le champ maternel», traduit du kirghiz par l’auteur et Nina Branche, in: Tchinghiz Aïtmatov, «Adieu Goulsary», Paris 1968, pp. 233–234 et 358–359.

Photo de gauche: Des soldats américains montant dans un avion militaire qui les transportera en Afghanistan. (photo Reuters)Photo de droite: Des soldats américains dans un avion militaire en route vers une base militaire en Kirghizie. En Kirghizie, il y a depuis 2001 une base pour les troupes américaines impliquées dans la guerre en Afghanistan. Maintenant, la Kirghizie veut que les Américains ferment cette base.
(photo Damon Winter/Redux/Laif)