Horizons et débats
Case postale 729
CH-8044 Zurich

Tél.: +41-44-350 65 50
Fax: +41-44-350 65 51
Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains Journal favorisant la pensée indépendante, l'éthique et la responsabilité
pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains
18 juillet 2016
Impressum



deutsch | english
Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°19, 16 mai 2011  >  Des émotions à la place d’objectivité [Imprimer]

Des émotions à la place d’objectivité

ab. Depuis le début des émeutes en ­Afrique du Nord ce sont des émotions qui dominent les émissions d’informations et remplissent des pages de la presse écrite. Elles remplacent l’objectivité et le contenu orienté vers la réalité. Une fois ce sont des tirades de jubilation et une minute plus tard c’est l’industrie de la panique qui donne le ton. Le citoyen voulant s’informer se sent comme dans un lave-linge qui tourne à plein régime et il ne lui reste qu’une solution: s’en sortir mentalement et rechercher l’objectivité. Nous ne vivons pourtant plus à l’époque des magiciens et des pro­phètes. L’humanité n’a-t-elle pas conquis la médecine et la tech­nique? La pensée scientifique en général? Il n’y a pas si longtemps que toute une génération d’étudiants s’est réjouie des images fascinantes que lui offrait le microscope électro­nique.
Maintenant qu’à Fukushima est advenu le triple accident, le tremblement de terre, le Tsunami et l’accident maximal hypothétique de centrales nucléaires, alors le traitement médiatique émotionnel a repris de plus belle. Tout le monde est devenu «vert» de panique! Pourquoi donc tout l’appareil des partis, support de l’Etat, devrait-il d’abord être reconstruit en «vert» avant que le citoyen ait la possibilité d’y réfléchir? Et cela en même temps dans les deux pays, en Allemagne et en Suisse? Le ministre allemand pour l’environnement de la CDU, Röttgen – tout d’un coup très néo-vert – a déclaré immédiatement après le début de la catastrophe: «Des entre­prises qui se mettent en dehors de ce consensus vivront le destin des dino­saures et s’éteindront.» C’était sensé être un avertissement à l’adresse de l’économie allemande. En Suisse, avec la démocratie directe, il faut se mettre à l’œuvre un peu plus subtilement. Mais ici également les représentants des partis néo-verts se font remarquer et cela d’une toute autre façon que les vrais écologistes qui s’engagent de façon durable et persistante pour une véritable amélioration des conditions de vie sur cette planète. Du Vorarlberg et de Stuttgart est même venue la menace d’une plainte contre la Suisse à cause des centrales de Beznau et de Mühleberg, accueillie de façon étonnamment flegmatique par les néo-verts suisses. Est-ce qu’ils s’en réjouissent? Pour pouvoir ensuite dissoudre la Suisse dans une nouvelle région néo-verte du lac de Constance? Et pourquoi donc tous ces va-et-vient pendant des semaines au lieu de laisser expliquer à la nation, par le département IX de l’EPFZ, les points importants?
Il est d’autant plus réjouissant de pouvoir lire, dans la NZZ du 6 mai, l’article «Vernachlässigte Brennelement-Lagerbecken» [des bassins de stockage d’éléments radioactifs négligés] et le commentaire «Politisches Restrisiko» [Risque politique subsistant] démontrant avec un réalisme qui fait du bien par où il faut commencer à travailler. Pirmin Bischof, conseiller national PDC et conseiller administratif de la centrale nucléaire de Gösgen, a déclaré le troisième jour après le début de l’accident à Fukushima: «Le monde n’est plus le même qu’avant-hier. Avec les événements au Japon, pour la politique suisse du nucléaire, se posent des questions essentielles. Toutes les an­ciennes questions se posent à nouveau. Et là, je ne suis pas sûr que dans la politique, nous ayons jusqu’à présent évalué les pro­blèmes de manière appropriée. Nous avons tous pris en considération les impôts et les réflexions politiques. On a, à juste titre, parlé de la question des lieux de stockage définitif, mais ce qu’il faut mettre tout en haut de l’agenda, c’est la sécurité de la population, et cela vaut pour les nouvelles concessions comme pour les centrales anciennes.» Une voix d’une honnêteté bienfaisante, qui mérite d’être écoutée.
Bienfaisante également la remarque dans le commentaire de la NZZ «Le ­risque politique subsistant» de l’auteur (dsc.) que «les remontrances» au pays par les partis politiques ne représentaient jusqu’à présent pas une véri­table preuve de compétence, et qu’il faut jeter d’autres fondements. Un nouveau problème de cette envergure pour l’humanité a besoin d’un peu plus de bases scientifiques et de concordance internationale. Ceux qui voudraient augmenter en vitesse le nombre des membres de leurs partis font penser de façon très désagréable à la soif de pouvoir au détriment d’un malheur.
Entre-temps, un nouveau gouvernement est intronisé à Stuttgart. Kretschmann se présente comme le catholique de gauche le plus sérieux, en même temps que comme personnalité éclairée et porteuse d’espoir, qui a du «soleil au cœur». S’il en était ainsi – cela ne pourrait pas faire de tort à l’humanité… Mais ce qui détonne, c’est que le vote populaire promis à la population avant les élections aurait dû être changé, selon le résultat de la votation, en une simple consultation populaire sans engagement. Comme le vote populaire promis a été organisé en faisant référence au système politique suisse, soit la démocratie directe, cette pirouette politique aura du côté suisse encore pour longtemps un goût désagréable. Kretschmann devrait-il être le lien idéologique entre Röttgen et un PDC néo-vert? Une nouvelle Internationale verte à fonder dans le noyeau de l’Europe? Ou bien amener la Suisse dans l’UE sur un élan vert, qui passerait plus facilement que la menace de la cavalerie?     •

Sources:
–    «Verhandlungen über Stuttgart 21» dans: Frankfurter Allgemeine Zeitung du 21/4/11, p. 2
–    «Wir haben die Sonne im Herzen», dans: Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung du 1/5/11, p. 2, 3
–    «Feindbild Röttgen» / «Der Umweltminister ist der Mann der Atomwende. Die Konservativen in der Partei und in der Industrie bringt er damit zu Weissglut», dans: Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung du 1/5/11. p. 33
–    «Vernachlässigte Brennelement-Lagerbecken» und «Politisches Restrisiko», dans: Neue Zürcher Zeitung du 6/5/11, p. 9