1958, de Gaulle et l’OTANpar Jean-Paul Bled, professeur des universités, président d’honneur du RIF, ParisVoici cinquante ans que le général de Gaulle revenait au pouvoir. Les commémorations ont ceci d’utile qu’un regard sur le passé permet d’interroger le présent. On aura observé que Nicolas Sarkozy s’est abstenu de toute célébration de ce cinquantenaire. Il lui aurait fallu faire l’éloge d’une Constitution qu’il s’évertue à mettre à mal. C’est aussi en 1958 que le général de Gaulle pose clairement le problème de la compatibilité de l’OTAN avec les intérêts de la France. Ce rappel serait évidemment mal venu alors que le Président de la République s’apprête à ramener la France dans la structure intégrée de l’Alliance. Quand il revient au pouvoir, le 1er juin 1958, le général de Gaulle est accaparé par d’autres urgences que les affaire internationales. Deux priorités s’imposent à lui: la réforme des institutions et le conflit algérien. L’effondrement de la IVe République a montré la nécessité de doter la France d’une nouvelle Constitution. Son élaboration occupe la plus grande partie de l’été jusqu’au référendum du 28 septembre. D’autre part, le conflit algérien constitue un frein au développement d’une diplomatie française tous azimuts. Atlantique Nord?Prenant acte de cette nouvelle donne, de Gaulle propose d’instituer un «directoire» tripartite, composé des trois puissances nucléaires ou en passe de le devenir (Etats-Unis, Royaume-Uni, France) qui étendrait son champ d’action au-delà de l’Atlantique Nord, en fait à l’échelle de la planète: il aurait, d’une part, à prendre les décisions communes dans les questions politiques touchant à la sécurité mondiale, d’autre part, à établir et, le cas échéant, à mettre en application les plans d’action stratégique, notamment en ce qui concerne l’emploi des armes nucléaires. Il ne fut pas donné suite à cette proposition. Avec ce refus, les choses étaient nettes. D’ailleurs, le Général avait laissé percer ses intentions dans les conclusions du mémorandum: le gouvernement français considère comme indispensable une telle organisation de la sécurité. Il y subordonne dès à présent tout développement de sa participation à l’OTAN et se propose, si cela paraît nécessaire pour aboutir, d’invoquer la procédure de révision du traité de l’Atlantique Nord, conformément à l’article 12. Après cette fin de non recevoir, il a arrêté sa décision de sortir de l’OTAN. Restait à choisir le moment opportun pour l’annoncer et la rendre effective. Ce moment serait dicté par les circonstances. Il importait d’abord de le préparer, en procédant par étapes. Ce qui fut fait. Source: L’Indépendance no 47/juin 08 |