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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°49, 12 décembre 2011  >  La société ne peut pas accomplir les tâches dévolues à la famille [Imprimer]

La société ne peut pas accomplir les tâches dévolues à la famille

 

Interview de Beatrix von Storch, présidente de l’association allemande «Zivile Koalition e.V.»

Dans notre édition no 47 du 28 novembre, nous avons publié la première partie de l’interview de Beatrix von Storch. Elle y parlait du projet d’accord sur le MES et des efforts des citoyens pour l’empêcher grâce au travail d’information accompli par la «Zivile Koalition e.V.» (cf. encadré ci-contre). Elle demande un retour à une économie raisonnable, à une vraie économie de marché dans un Etat démocratique et souverain.
Dans la seconde partie de l’interview, que nous reproduisons ci-après, il est avant tout question de la famille et de l’école qui sont indispensables au développement et à la sauvegarde d’une démocratie fondée sur des valeurs et sur la conception chrétienne de l’homme. Beatrix von Storch explique que la famille normale, cellule de base de l’Etat, est la condition sine qua non du bon fonctionnement de l’économie de marché et elle montre le rôle joué par une conception correcte de l’homme. Elle évoque également le rapport entre la politique scolaire et les perspectives qui s’offrent à la jeune génération. Il ne s’agit pas pour elle de condamner quoi que ce soit mais de montrer le rôle que doivent jouer les principes directeurs de l’Etat.

Horizons et débats: Sur votre site Internet (www.zivilekoalition.de) vous abordez également les thèmes de la famille, de l’éducation et de l’école. Vous avez organisé une campagne intitulée «Protégeons les enfants contre leur sexualisation par l’Etat».

Beatrix von Storch: Ce ne sont pas seulement les sujets économiques qui inquiètent. L’économie à petite échelle, la société à petite échelle, c’est la famille. Je me souviens de l’époque où je pouvais dire: «Dans mon entourage, je ne connais pas de chômeur». Mais il y a longtemps que la situation a changé. Maintenant je connais beaucoup de chômeurs. Je ne connaissais pas non plus ces «partenariats modernes» qui prennent de plus en plus d’importance.
Je ne les condamne pas. Il y a des gens qui vivent autrement que nous, différemment de ce à quoi on est habitué. La question n’est pas là. Il s’agit des principes directeurs de l’Etat. Quel modèle l’Etat offre-t-il? Je pense que la famille est la base de la société. Quand la société à petite échelle, c’est-à-dire la famille, se défait, la société se défait également. La société ne peut pas en supporter les conséquences. Je ne peux pas, avec mes impôts, payer des enseignants qui apprennent à parler aux enfants de deux ans parce qu’ils n’ont plus de famille. Je ne peux pas financer dans les écoles, en plus des enseignants, deux travailleurs sociaux par classe qui doivent tout transmettre à des enfants qui n’ont pas appris à la maison à participer à l’enseignement pendant 45 minutes.
On ne cesse de réclamer des travailleurs sociaux pour les écoles. Or pourquoi en avons-nous besoin? Parce que les enfants n’apprennent plus chez eux à développer un minimum d’aptitudes fondamentales. Cela commence par le fait qu’ils n’apprennent plus à se lever le matin, à prendre un petit déjeuner convenable, à arriver à l’heure en classe (car sinon l’école ne fonctionne plus). Là ils doivent suivre l’enseignement pendant des périodes de 45 minutes en y participant. Ensuite, ils doivent rentrer chez eux à midi et déjeuner. Il est souvent utile que quelqu’un puisse les aider à faire leurs devoirs.
Mais que se passe-t-il quand tout cela ne fonctionne plus parce que le matin, à la maison, on ne se lève pas, parce qu’il n’y a pas de petit déjeuner ou qu’on le remplace par une cigarette, quand les enfants ne vont pas en classe? Il faut alors charger un travailleur social d’aller chercher les enfants et de les accompagner à l’école. Ensuite, ils sont certes en classe mais incapables de prononcer une phrase allemande grammaticalement bien structurée. On doit commencer par leur apporter une compétence linguistique qu’ils n’acquièrent plus chez eux parce que là plus rien ne fonctionne.
Cela ne fonctionne plus parce que la société ne peut pas accomplir les tâches dévolues à la famille. Les enfants ne peuvent apprendre à rester assis tranquillement et à écouter ceux qui leur parlent que si, pendant six ans, ils ont eu une personne de référence, un entourage stable, un rythme de repas régulier. Ce sont là des besoins existentiels fondamentaux. Un nourrisson crie quand on ne lui donne rien à manger, un petit enfant crie quand il a faim, car il ressent cela comme une menace existentielle.
Quand ils ont pu faire confiance pendant six ans à des personnes de référence qui s’occupent d’eux, quand ils grandissent dans un environnement protecteur, les choses sont toutes différentes. Cela n’a rien à voir avec la richesse. Les familles très modestes peuvent également offrir cette stabilité. Il existe aussi des enfants victimes de la richesse: ils ne manquent pas de biens matériels mais de personnes de référence fiables. Ils ont de l’argent qui leur permettra peut-être d’aller au restaurant à 10 ans, mais ils n’ont pas de relation de confiance, pas de repères.

Quelle est l’origine de vos valeurs morales?

Elle se trouve dans la conception chrétienne de l’homme qui nous fournit une base très stable. Ce que représente une mauvaise conception de l’homme se lit dans les excès. Cela se manifeste particulièrement dans le domaine de la famille et de la politique de la famille. Les excès se manifestent dans le domaine du «genre». Les défenseurs de cette théorie veulent créer un homme nouveau.
En revanche, nous sommes convaincus qu’on ne peut pas créer d’homme nouveau. L’homme est ce qu’il est et on ne peut pas en faire un autre être par l’éducation. Si l’on part de la conception chrétienne selon laquelle l’homme est libre et non programmable…

La conception personnaliste …

Oui, et elle exclut certains excès.

Elle englobe tout le domaine des valeurs …

Voici un exemple de ce qui ne va pas. La politique du «genre» ne heurte pas seulement le sentiment de ceux qui adhèrent à la conception chrétienne de l’homme. Nous devons montrer à tout le monde ce que représente l’idée de vouloir créer par l’éducation un homme nouveau qui choisit son genre indépendamment de son sexe biologique.
Nous partons de l’idée que l’individu naît garçon ou fille et que, par exemple, la fille n’a pas la possibilité de décider d’être un homme pour la seule et unique raison qu’elle préférerait être un homme. Il existe certes des êtres dont le corps ne correspond pas à l’identité sexuelle souhaitée. Mais c’est un problème. Il y a quelque chose qui cloche chez eux. Partir de là pour dire que chacun doit pouvoir choisir son sexe est faux non seulement pour nous autres chrétiens mais aussi pour les musulmans. Eux aussi pensent que quand un enfant naît, on voit si c’est un garçon ou une fille et que si à un moment donné le garçon se sent fille, il y a un problème. Mais cela ne signifie pas qu’il faille restructurer la société dans son ensemble, qu’il faille supprimer les pères et les mères simplement parce qu’il existe des couples de deux mères ou de deux pères, des hommes ou des femmes qui élèvent seuls leurs enfants ou s’y mettent à trois, etc.
Notre point de départ est la conception chrétienne de l’homme. Nous demandons que l’Etat donne des lignes directrices, indique ce qui est souhaitable, sans condamner ceux qui s’en écartent.

Quelles sont vos idées en matière d’école?

Outre la politique de la famille, la politique scolaire est déterminante car elle exerce une influence sur la manière dont nos jeunes se comportent et se développent au sein de notre école publique. On sait bien que les perspectives d’avenir des enfants sont liées à l’offre scolaire.
Je mentionne ce point en songeant à l’éducation sexuelle obligatoire des petits enfants dans nos établissements publics. Vous savez ce que l’on préconise maintenant activement aussi bien à Berlin qu’en Suisse. L’«instruction» interdisciplinaire des enfants n’est plus une instruction: on leur inculque l’image de l’homme propre à l’idéologie du «genre».
Il n’est donc plus question dans les livres de contes illustrés «du roi et de la princesse» mais «du roi et du roi»: Il est question du roi qui ne trouve pas sa princesse, mais son prince et qui l’épouse. Les jeux de rôle proposés aux enfants de 13 ans doivent aborder la question de savoir comme faire son coming out à la maison ou – et il existe vraiment à ce sujet du matériel pédagogique – comment préparer un week-end gay à Berlin, quels bars gays fréquenter, quelles activités existent pour les homosexuels, etc. On assiste ici à une sexualisation forcée.
En Rhénanie du Nord-Westphalie, lors des dernières élections législatives régionales, des parents s’y sont opposés. Ils ont dit que cela suffisait, que cela violait leurs droits éducatifs, mais l’école publique a déclaré que cela relevait de sa mission éducative, qu’il existait une obligation scolaire et que les parents ne pouvaient pas s’opposer à l’éducation sexuelle à l’école. Ils ont persisté dans leur opposition et l’école leur a infligé une amende. Ils ont alors refusé de la payer et ont été incarcérés. Imaginez cela, en Allemagne! On a emprisonné des parents parce qu’ils s’opposaient à la sexualisation forcée de leurs enfants.
Cela n’a plus rien à voir avec la mission éducatrice de l’école publique. On endoctrine les élèves avec des idées qui blessent leurs âmes d’enfants. On leur transmet des contenus que je tiens à épargner à mon enfant. Je pense que ce sujet est essentiel pour le développement des enfants et pour la société en général et qu’il faut amener les gens à prendre davantage conscience du problème afin qu’ils se rendent compte de ce qu’on enseigne dans les écoles. Pourquoi les élèves devraient-ils organiser, en s’appuyant sur des documents richement illustrés, un week-end gay à Berlin, savoir quelle est l’offre d’activités, quels bars gays on y trouve et quelles formes de relations sexuelles y sont possibles. Un week-end gay à Berlin ne signifie pas qu’on va assister à des matchs de football ou aller au cinéma: il s’agit de sexe. Pourquoi parler de cela à l’école? Jusqu’ici, il n’était pas question à l’école de savoir comme passer un week-end hétérosexuel à Berlin! Il s’agit ici manifestement de mettre l’accent sur une orientation sexuelle particulière.
En arithmétique, jusqu’ici, on avait des problèmes libellés par exemple de la façon suivante: «Jonas achète trois pommes avec son père et rentre à la maison. La mère de Jonas avait déjà deux pommes. Combien la famille a-t-elle de pommes?» Maintenant ce genre de formulation est considéré comme un endoctrinement visant une hétérosexualisation forcée. Aussi la formulation actuelle est-elle la suivante: «Jonas achète trois pommes avec son père et rentre à la maison. Tom, l’autre père de Jonas, avait déjà deux pommes. Combien la famille a-t-elle de pommes?» Et cela doit faire l’objet d’un enseignement interdisciplinaire.

A-t-on modifié les manuels scolaires?

Oui, des couples homosexuels sont invités dans les écoles pour s’embrasser devant les élèves. Les enfants doivent voir cela et l’accepter comme quelque chose de tout à fait normal. C’est pourquoi les manuels traditionnels sont retirés du marché. On les récrit. Il y a un certain temps, à Hambourg, un énorme scandale a éclaté à la suite de l’impression d’un mini-livre illustré pour enfants («Pixibuch») qui devait être également utilisé dans les écoles et les jardins d’enfants. Lorsque le livre original a été présenté, le «lobby du genre» a poussé des cris d’orfraie et déclaré qu’il était impossible de mettre ce livre sur le marché. Pourquoi? Parce qu’on y voyait, assis à une table, Lisa, son père et sa mère. Pour le lobby, cette représentation classique de la famille était inadmissible car l’enfant, assise en face de ses parents, occupait une place subordonnée. Ça n’allait pas. L’enfant devait au moins … Et par-dessus le marché, elle s’appelait Lisa.
On ne devrait plus avoir le droit de représenter des familles normales. Les enfants ne doivent plus porter de noms allemands. Il faut absolument qu’il y ait au moins un noir, un musulman, un couple homosexuel, un couple de lesbiennes, une famille recomposée.
On prépare des jeux. Qu’est-ce qu’une famille? Il existe 16 modèles de familles différentes: ma mère, mon père et moi, mon chien et moi, etc. C’est ce qu’on enseigne maintenant. C’est ce que veut l’Etat.
Je sais qu’il existe des divorces et la mère ou le père se remarie. Les enfants doivent accepter le fait d’avoir un nouveau père ou une nouvelle mère. Je ne formule pas de jugement mais la question est de savoir quelles lignes directrices l’Etat propose.    

Merci beaucoup pour cet entretien.•

«Coalition civile»

«Nous sommes un groupement de citoyens qui militent pour davantage d’engagement civil dans la société allemande. Ensemble, nous nous employons pour des réformes que les gens en Allemagne désirent réellement et dont ils ont besoin.
Nous sommes une organisation financièrement indépendante, hors-partis et non gouvernementale, qui donne une voix commune au grand nombre d’individus qui s’engagent au sein de la société civile.
Ainsi nous représentons les intérêts des citoyens afin de promouvoir nos préoccupations communes face aux instances politiques et aux médias.
En tant que coalition civile, nous sommes une communauté puissante, qui est entendue des médias, des institutions et des politiques – et qui est prise au sérieux comme interlocuteur et partenaire de négociation.
En tant que groupe de pression, la ‹Zivile Koalition e.V.› nous offre à tous la possibilité de positionner des idées et des points de vue politiques et d’aider à imposer les intérêts des citoyens au sein des instances politiques.»

Source: www.zivilekoalition.de