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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2013  >  N°33, 4 novembre 2013  >  Offrir des perspectives à la jeunesse – une contribution importante à la stabilité politique [Imprimer]

Offrir des perspectives à la jeunesse – une contribution importante à la stabilité politique

thk. «Vivre dans des contextes fragiles» était le thème principal de la conférence annuelle de la DDC à Lugano. Le thème devrait être enseigné en cours d’histoire ou en éducation civique, car ce sont surtout les jeunes qui souffrent de la fragilité des Etats. L’édition de septembre 3/2013 du magazine «Un seul monde» de la DDC est consacré au thème «Fragilité – vivre dans la peur, la violence et la pauvreté.»
L’exemple du Honduras nous montre ce que cela signifie de vivre dans un contexte fragile. Le Honduras, lui-même, n’a pas eu à subir de guerre civile, mais il a été gravement endommagé par les guerres civiles se déroulant au Salvador, au Guatemala et au Nicaragua sans obtenir pour autant de l’aide internationale comme ces autres Etats. Depuis plus de deux décennies, l’insécurité augmente constamment. Des fusillades en pleine rue sont monnaie courante et la population doit y survivre, d’une façon ou d’une autre. Le problème principal est la criminalité des gangs, surtout parmi les jeunes, frustrés et au chômage. Au Honduras, le taux d’homicides est des plus élevés. En 2004, il y avait déjà 34 meurtres pour 100 000 habitants, en 2012 ce chiffre a plus que doublé et a atteint 85,5 meurtres par année. En 2012, 7172 personnes ont été victimes d’un délit de violence.
Bien que la population ait doublé au cours des trente dernières années, l’économie est en stagnation complète. La grande pauvreté et l’absence de perspectives rendent la tâche facile aux trafiquants de drogues et aux chefs de bandes. Y contribuent aussi l’affaiblissement de l’appareil judiciaire et de la police suite à la corruption et au taux élevé de la criminalité. Dans de grandes parties du pays, il n’y a aucune protection juridique et les gens ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Le gouvernement tente de rétablir l’ordre, mais jusqu’à présent sans grand succès. L’absence d’un Etat efficace et une police totalement dépassée font du Honduras un Eldorado de la mafia de la drogue. Les experts y voient la cause principale de la violence croissante. Dans ce pays, il n’y a actuellement guère de perspectives d’avenir pour les jeunes. Tout adolescent est d’emblée soupçonné d’être un criminel du fait du taux élevé de la criminalité juvénile. Ainsi, il est difficile pour de jeunes adultes de trouver un travail approprié.

Construction de structures étatiques

Depuis 1977, la DDC s’engage au Honduras. Pour répondre à la perte de l’autorité étatique, elle réagit avec des stratégies spécifiquement élaborées pour cette situation et se concentre notamment sur les droits de l’homme, la justice et la police. La Suisse participe avec ses propres moyens à une réforme de la police, qui est mise en place sous la direction de la Banque interaméricaine de développement (BID) en coopération avec les autorités honduriennes.
L’engagement de la Suisse se fait sur différents plans. Pour sécuriser le pays, il faut une police bien formée et bien équipée qui soit positivement ancrée dans la population. En même temps cependant, les gens et surtout les jeunes ont besoin de perspectives. Des projets de formations doivent leur offrir une chance. Avec l’aide de la Suisse, on propose dans de nombreuses villes des cours d’apprentissage aux jeunes vivant dans des conditions difficiles. Ils ont l’occasion d’apprendre à souder, de faire une formation de coiffeuse, d’électricien ou de boulanger pour être ainsi capable de subvenir eux-mêmes à leurs besoins, ce qui est une contribution importante à la stabilité de la société.

Le développement des communes est une contribution à la réconciliation

La fragilité peut ne toucher que certaines régions d’un pays. Le Myanmar en est un exemple. Depuis la soi-disant ouverture, ce pays vit un vrai boom économique, surtout dans les grands centres urbains. Là, le commerce est florissant, on y voit de plus en plus de voitures, de touristes et d’hommes d’affaires. Mais en périphérie ou à la campagne, c’est tout à fait différent. Les zones d’ombres de l’expansion économique im­posée de l’étranger sont indéniables. Là où on ne peut pas réaliser des affaires, le développement reste en suspens. C’est ainsi que la pauvreté est surtout visible dans les quartiers ouvriers de la banlieue de Yangon.
En outre, le pays souffre beaucoup des tensions ethniques ou religieuses et des combats violents qui ont éclaté entre la majorité bouddhiste et la minorité musulmane, les Rohingya. Cette année encore, on a pu constater des agressions notamment envers la minorité musulmane. En juin 2012, la Suisse a décidé d’y ouvrir une ambassade, mais depuis 2008 déjà – l’année du cyclone dévastateur Nagris –, elle y est présente par son aide humanitaire. La reconstruction met l’accent sur l’édification d’écoles. Cela suscite de la confiance envers la Suisse, ce qui lui donne la possibilité de réunir, pour un projet commun, des parties hostiles autour d’une table afin d’améliorer le développement des communes et la réconciliation entre les habitants.

Les projets de construction de routes au Burkina Faso: une sécurité accrue pour les paysans et les commerçants

Un autre exemple enthousiasmant de la coopération suisse au développement est le projet de construction routière au Burkina Faso. Le Burkina Faso compte parmi les pays les plus pauvres du monde et souffre de conflits récurrents dans la région du Sahel. Depuis 1976, la Suisse aide ce pays. L’édification d’infrastructures est une contribution importante pour le développement économique. La Suisse y utilise la méthode dite HIMO, (Haute intensité de main-d’œuvre). Celle-ci demande d’employer autant de main-d’œuvre autochtone que possible. Dans la construction routière, on ne voit donc pas de machines, mais des pioches, des pelles et d’innombrables mains fournissant une contribution sensée. Comme matériaux, on utilise des pierres locales qu’il faut extraire et amener. Les nouvelles routes sont adaptées aux besoins des populations et utilisables toute l’année. La période des pluies représente toujours un problème car les pistes sont détrempées et inutilisables. Il faut des voies de communication bien aménagées afin d’étendre le commerce à travers tout le pays.
Le travail est dur et demande beaucoup de ténacité et d’engagement de la part de la population. Pour favoriser la décentralisation, on planifie et réalise les projets de construction routière en collaboration avec les communes car ce sont elles qui devront par la suite les entretenir, ce qui nécessite un savoir-faire qu’il faut d’abord s’approprier. A ce jour, 300 km de routes avec 126 ponts ont été financés, reliant entre eux 50 villages et 500 000 habitants. C’est un immense avantage pour les commerçants et les paysans qui peuvent ainsi amener en toute sécurité leurs produits sur les marchés de la région.
Les différents exemples esquissés ci-dessus n’apprennent pas seulement au lecteur, ce que signifie travailler dans ces contextes fragiles, mais ils se prêtent très bien à la sensibilisation de nos jeunes à ces problématiques.    •

thk. L’appréciation de l’ambassadeur Dahinden que la Suisse «n’a pas d’agendas cachés et qu’elle ne pratique pas de politique de puissance» est la base fondamentale pour la coopération au développement suisse. La Suisse en tant qu’Etat neutre peut fournir de l’aide, là où d’autres pays n’ont plus d’accès aux Etats concernés et à leurs populations dans le besoin. C’est un joyau qu’il ne faut en aucun cas mettre à disposition. Mais si dans sa politique extérieure le chef du Département des Affaires étrangères Didier Burkhalter continue à faire du zèle auprès de l’UE et de l’OTAN, comme on peut l’observer de manière croissante ces derniers temps, nous perdons, d’une part, pour notre propre pays quelque chose de fondamental et d’autre part, nous perdons dans nos engagements au niveau international, notamment la possibilité d’agir de manière bénéfique en tant que médiateur lors de conflits. Cela ne doit pas se produire.