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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°11, 17 mars 2008  >  Protéger la terre et le paysage [Imprimer]

Protéger la terre et le paysage

par Reinhard Koradi, Dietlikon

D’après la volonté du Conseil fédéral, des étrangers pourront à l’avenir acheter des terrains en Suisse sans procédure compliquée. La lex Koller qui a fait ses preuves ne serait plus nécessaire aujourd’hui, selon l’argumentation du Conseil fédéral et des profiteurs de l’abrogation. Jusqu’à présent, des demandes semblables n’ont pas eu de succès auprès du peuple suisse. La protection du territoire est profondément ancrée dans notre pays. Malgré tout cela, le Conseil national décidera ces prochains jours l’abrogation de la Loi fédérale sur l’«Acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger».
La proposition d’abrogation de cette loi a été justifiée avec l’espoir «d’importantes impulsions pour l’économie nationale».1 Le Conseil fédéral sachant très bien que cette intention rencontrera certainement une résistance considérable dans la population et au Parlement, il se sert une nouvelle fois de l’astuce des «mesures d’accompagnement». Des mesures d’accompagnement sont – comme les expériences l’ont montré – sans effet et ne servent qu’à calmer les opposants d’un projet ou à freiner l’effet d’arguments justifiés. Le Conseil fédéral est apparemment conscient du fait que l’ouverture du marché des terrains et des immeubles en Suisse aux personnes résidant à l’étranger favorise de manière inquiétante les étrangers fortunés et les régions touristiques au dépens de la nature, du paysage et de la population indigène, c’est pour cette raison qu’il offre en tant que tranquillisant des mesures d’accompagnement de planification de l’aménagement du territoire.
La lex Koller est une protection efficace et absolument nécessaire de la terre et du paysage empêchant leur destruction suite à une recherche du profit unilatérale. L’espace vital naturel est de plus en plus transformé par des interventions basées sur l’économie du marché. Partout dans le monde on défriche les forêts, on construit les terrains arables et les espaces publics de détente et récréation. Les terres sont devenues l’un des multiples objets de spéculation qui apporte des gains énormes à certains mais qui signifient pour la grande majorité des populations une augmentation du coût de la vie menaçant l’existence.
L’abrogation de la lex Koller doit être considérée en vue des projets touristiques annoncés et planifiés en Suisse. Des investisseurs étrangers sont prêts à investir des centaines de millions dans des «oasis de détente» pour les super riches; ainsi à Andermatt (200 à 300 millions de francs), à Crans Montana (environ 350 millions), sur la Schatzalp au-dessus de Davos (160 millions). Il est prévu de transformer Lenzerheide – jusqu’à présent un lieu privilégié pour les vacances en famille – en une station ultra-chic pour les super riches qui catapultera ce village dans la «top-class» de l’offre touristique en Suisse. Pour la plus grande partie de la population suisse et pour les familles avec enfants Lenzerheide deviendra une zone interdite à cause de leur manque de pouvoir d’achat.
Le cristal de Botta à Celerina et la tour du «Petit Cervin» sont d’autres ingérences qui préparent le tourisme suisse, avec des capitaux étrangers, à accueillir un nouveau public. Celui qui ne peut pas débourser 2000 francs par personne et par nuit n’aura – selon les projets de la haute finance – plus de permission de séjour dans ces stations touristiques.
A la place de la lex Koller on aura alors la lex «du compte en banque bien garni»! La plupart des projets énumérés ici pourraient encore échouer suite à la lex Koller – c’est pour cette raison qu’elle doit être éliminée. Le projet d’Andermatt a été autorisé à l’encontre de la loi existante, mais les autorités ne laisseront pas passer d’autres infractions de la sorte.
Ces projets dans les Alpes n’ont rien à voir avec un tourisme moderne. Il nous faut des projets durables qui ménagent le paysage, sans colosses en béton. A part les arguments de politique sociale et environnementale il y a donc aussi des raisons économiques contre l’abrogation de la lex Koller.
Espérons que nos représentants à Berne s’en rendent compte et qu’ils donneront la priorité au bien du peuple plutôt qu’au bien des investisseurs étrangers.    •

1    Message du Conseil fédéral

Le 12 mars, le Conseil national a renvoyé au Conseil fédéral l’abrogation de la lex Koller. Par 115 voix contre 67, la Chambre du peuple n’a pas voulu d’une suppression de cette loi sans mesures d’accompagnement plus musclées pour lutter contre la spéculation et les effets désastreux des «lits froids».