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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°11/12, 30 mars 2009  >  S’agit-il de bien plus que de l’argent? [Imprimer]

S’agit-il de bien plus que de l’argent?

Prises de position actuelles à propos du ministre des Finances allemand Peer Steinbrück et de sa politique

km. Le dictionnaire sur Internet, Wikipédia (daté du 20 mars) écrit sur le ministre des Finances allemand Peer Steinbrück (SPD):
«Pendant son mandat de ministre des Finances et plus tard, de Premier ministre de la Rhénanie du Nord-Westphalie (NRW), le parlement du Land prit des décisions budgétaires dans les années 2001 et 2002 qui, selon le tribunal constitutionnel du Land, violaient la Constitution. La formation de réserves financée par des crédits a violé la loi de la rentabilité.
En 2003, Peer Steinbrück a fait l’objet de critiques dans le cadre de l’affaire de la WestLB car il n’avait pas participé aux séances de la commission de crédit dont il était membre en tant que Premier ministre. […]
En 2005, après que le SPD ait atteint avec Steinbrück, candidat de tête de liste aux élections parlementaires en Rhénanie du Nord-Westphalie, son plus mauvais résultat depuis 1954 à l’issue d’une élection parlementaire en NRW avec 37,1% et que les Verts aient aussi perdu des voix, la coalition rouge-verte qui le soutenait perdit sa majorité au Parlement. […]
En 2007, on a attribué à Steinbrück pour l’introduction du numéro d’identification fiscal valable pour toute la vie et pour tous les habitants d’Allemagne le prix négatif du Big Brother Award.»
Spiegel Online a écrit le 19 mars 2009 sur les possibilités de saisie des institutions fiscales allemandes qui sont subordonnées au ministre des Finances:
«Depuis hier, nous savons que nous sommes tous Indiens. La Cour fédérale des finances a publié un jugement, qui consacre les méthodes «à la western» même dans le propre Etat fiscal de Steinbrück. Sans soupçon concret, les autorités financières ont ainsi le droit de briser le secret bancaire et de juger des déclarations d’impôts des citoyens au moyen des opérations sur leur compte bancaire.
On peut comparer le fisc allemand à un propriétaire de saloon qui encaisse ses exigences arme en main – c’est juste une question de masquage: tous deux se moquent de l’Etat de droit et des tribunaux réglementaires, mais ils cherchent leur droit par eux-mêmes. […]
Il faut se poser la question: pourquoi le fisc croit-il que l’Etat de droit ne vaut pas pour lui? Pourquoi le contribuable est-il soumis à moins de protection juridique que même le terroriste présumé?»
Le magazine d’informations allemand Focus a publié le 21 mars cette histoire intéressante sur Steinbrück:
«Maintenant, il s’avère qu’une grave tare entache les mots fleuris du trésorier allemand. Il s’agit d’un article que la main droite de Steinbrück, le secrétaire d’Etat Jörg Asmussen, a publié il y a deux ans dans un magazine – en tant que voix officielle du ministre. Le professionnel de la finance dissertait sur le rôle de l’Etat dans le marché de valeurs mobilières ABS risquées. Les déclarations de l’époque coupent le souffle.
Les Asset Backed Securities, bref ABS, sont considérées comme déclencheurs de la crise. Des experts parlent de crédits titrisés: aux USA, des banques ont accordé de multiples hypothèques à des débiteurs douteux, ils en ont formé des titres garantis (ABS) et les ont bazardés à des investisseurs. Des agences de rating y ont déposé leur label de qualité. Souvent, la plaquette laissait conclure à une sécurité de haut niveau. C’est un jugement fallacieux: il s’est révélé pour la première fois l’année dernière, que beaucoup de titres ABS n’étaient pas du tout sûrs.
Beaucoup d’investisseurs ont remarqué que des déchets toxiques sommeillaient dans leurs bilans. Pas seulement là: des banques allemandes, la banque IKB semi-publique et beaucoup d’autres banques publiques du Land avaient fondé des sociétés d’intérêts. Là, une sauvage escroquerie a eu lieu avec ABS, à peine réglementée par le service de contrôle allemand.
Tout d’un coup, la fête a été finie – et le contribuable allemand a dû débourser des milliards d’euros pour sauver les instituts.
Apparemment, les banquiers escrocs ont pu penser qu’ils étaient du moins en partie en accord avec le gouvernement. En octobre 2006, Jörg Asmussen, étant encore chef du département au ministre des Finances, a écrit dans la Zeitschrift für das gesamte Kreditwesen [Magazine pour l’ensemble du système de crédit]: Il est important que ‹le marché d’ABS se développe en Allemagne plus fortement que jusqu’à présent›.
Le ministre des Finances doit veiller à ce ‹que les instituts n’aient pas d’obligations inutiles de contrôle et de documentation quand ils investissent dans des produits ABS courants avec une bonne notation.› Surveillance étatique? Ne pas exagérer s’il vous plaît. Asmussen, qui siégeait au conseil de surveillance de l’IKB, s’est exprimé de manière très positive sur les sociétés d’intérêts.
Cet homme a fait carrière depuis la parution de cet article et il est devenu secrétaire d’Etat sous Steinbrück. Le paquet de sauvetage pour le domaine financier allemand s’élevant à des milliards porte essentiellement sa signature. La ‹Süddeutsche Zeitung› écrit de manière caustique que ‹les boucs sont donc devenus des jardiniers›».
Par des propos assortis, le ministre des Affaires étrangères du Luxembourg, Jean Asselborn, a indiqué dans une interview avec le Deutschlandfunk le 18 mars ce qui suit:
«On ne devrait vraiment pas maintenant suggérer l’impression que cette crise financière ait pu être provoquée par des pays tels que la Suisse ou le Luxembourg.»
Dans le journal autrichien «Standard», on pouvait lire le 19 mars dans une interview avec le chancelier autrichien Werner Faymann (SPÖ) la déclaration suivante:
«Je crois qu’il (Steinbrück) a regardé trop de westerns.»
Le 20 mars, le «Tages-Anzeiger» suisse cite le président adjoint de la fraction CDU/CSU au parlement allemand, Michael Meister:
«La rhétorique de Steinbrück et ses mesures planifiées contre le contribuable allemand sont déshonnêtes et respectivement inadéquates. […] En fait, on devrait désarmer et retourner à la table des négociations.»
Lors des débats au Parlement sur la déclaration gouvernementale de la chancelière allemande Angela Merkel au sujet de la crise financière et économique le 19 mars, le président de la fraction du FDP allemand, Guido Westerwelle a remarqué:
«Nous, les Allemands, nous sommes en matière de politique fiscale les conducteurs circulant à contresens en Europe […]. Vous ne peuvez même pas maintenir la paix avec la Suisse. Monsieur Steinbrück, Monsieur le ministre des Finances, je dois vraiment vous dire: cette manière de traiter nos pays voisins est non diplomatique et d’une rare insolence. […] Pour le citoyen normal, c’est en général moins l’oasis, mais beaucoup plus le désert autour du problème […]. Vous devriez user de la même énergie pour assécher les paradis fiscaux, pour faire en sorte que les déserts fiscaux allemands redeviennent enfin plus féconds grâce à des impôts plus bas.»
Et finalement à l’adresse de la chancelière: «Madame la chancelière: au lieu d’adresser une parole diplomatique à nos voisins en tant que chef du gouvernement, vous dites – tout en restant dans l’esprit de Monsieur Steinbrück – qu’on devrait nommer les chevaux et les cavaliers, menacer avec le fouet et expédier la cavalerie sur le champ de bataille contre les Indiens. Je crois que cette attitude est tout simplement irresponsable. Vous avez perdu votre boussole au gouvernement.»
Et même le président de la fraction de la CDU/CSU au parlement allemand, Volker Kauder, s’est exprimé de manière critique dans la «Leipziger Volkszeitung» (annonce préléminaire du 22 mars):
«Le chef de la fraction de l’Union, Volker Kauder, a maintenant exigé du candidat du SPD à la chancellerie et ministre des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, qu’il intervienne contre son ami du parti et ministre des Finances Peer Steinbrück, à cause de sa campagne contre la Suisse au sujet des paradis fiscaux. Kauder a déclaré dans une interview avec la ‹Leipziger Volkszeitung› (Edition du lundi): «Monsieur Steinmeier doit rappeler à l’ordre Steinbrück, son ami de parti» […]. Kauder s’est clairement opposé aux attaques verbales très vives que Steinbrück a lancées contre la Suisse à propos de sa politique fiscale. ‹J’attends de Monsieur Steinmeier, qui est avant tout ministre des Affaires étrangères et non candidat à l’élection, qu’il intervienne quand un de ses amis du parti est en train d’endommager la réputation de la République fédérale d’Allemagne.›»
***
Ce petit extrait de prises de position quant à la personne et à la politique de l’actuel ministre des Finances allemand, Peer Steinbrück, montre que celui-ci est même controversé dans son propre pays.
D’où prend-il donc cette suffisance pour montrer du doigt déjà depuis des mois d’autres pays et peuples et faire croire qu’il serait un archange en matière de justice fiscale? Il ne peut certainement pas se reposer sur sa propre politique ou sur la politique de son parti de ces dernières décennies.
Il serait certainement peu utile de faire de la recherche de caractère. En politique, on joue des rôles. Le comportement des politiciens de haut rang est exactement étudié. Il n’y a rien de sincère là-dedans. Mais quel est le rôle de Peer Steinbrück?
Oui, il s’agit d’une farce concernant la lutte électorale qui débute pour les élections du Bundestag. Même Spiegel Online a écrit, qu’avec le tintamare que fait Steinbrück on ne résout aucun problème relatif à la crise financière et économique actuelle, mais la recherche de boucs émissaires et le fait de vitupérer contre eux est bien vu dans l’opinion publique. Mais cette explication suffit-elle?
Ne se pourrait-il pas qu’il se cache aussi tout autre chose là-derrière? On s’étonne que Steinbrück puisse jouer son rôle à fond. En politique, cela ne va pas sans un soutien puissant. Qui a intérêt à affaiblir la Suisse en lâchant la bride à Steinbrück? Quelle grande convoitise la Suisse éveille-t-elle – et chez qui? S’agit-il peut-être de choses beaucoup plus importantes que seulement de l’argent déposé dans les banques suisses?
La politique allemande, on le sait, a avant tout deux suzerains: un petit pays au Proche-Orient et un grand pays outre Atlantique. Sinon, où chercher ailleurs?     •