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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°11, 19 mars 2012  >  Nombreuses sont les bonnes bases de coopération accrue entre l’Europe et la Russie [Imprimer]

Nombreuses sont les bonnes bases de coopération accrue entre l’Europe et la Russie

Après les élections présidentielles en Russie

par Karl Müller

Depuis les élections présidentielles en Russie, des voix se font entendre sous nos latitudes pour une coopération future entre la Russie et l’Europe. L’une de ces voix nous vient de l’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder qui a lancé l’idée, dans une interview accordée le 7 mars au Deutschlandfunk, que les deux régions, Europe et Russie, pourraient beaucoup profiter d’un «partenariat de modernisation».
Vladimir Poutine s’était exprimé de la même façon dans un article important paru le 27 février (cf. agence de presse Ria Novosti).
Poutine propose une nouvelle fois «d’entreprendre les démarches nécessaires pour la création d’un espace économique et social unifié allant de l’Atlantique au Pacifique». Il souhaite «la création d’une communauté économique harmonieuse s’étendant de Lisbonne à Vladivostok, et de tendre vers une zone de libre commerce, voire d’une intégration économique».
Cet article de Poutine présente aussi un autre aspect intéressant et pourrait servir de base pour un dialogue constructif concernant les tâches à venir et une coopération en politique mondiale.
Poutine a écrit: «Je reste persuadé que la sécurité des pays dans le monde est indissociable, qu’il n’est pas tolérable de donner dans la violence, et que les normes fondamentales du droit international doivent être respectées. Délaisser ces principes revient à déstabiliser les relations internationales.»
Poutine rappelle les normes du droit international: «Les nombreux conflits armés qui ont éclaté ces derniers temps, et qui sont ‹justifiés› sous couvert d’objectifs humanitaires, violent le principe sacré de la souveraineté des pays, qui doit être respecté. Il apparaît là – en morale et en droit – un nouveau vide dans les relations internationales. On prétend souvent que les droits de l’homme auraient une priorité par rapport à la souveraineté nationale. Cela est certainement vrai – tous les crimes contre l’humanité doivent être poursuivis par des instances juridiques internationales. Mais utiliser cet argument pour violer la souveraineté nationale, et pour imposer les droits humains de manière sé­lective par des forces extérieures, lorsque cette ‹défense des droits de l’homme› viole les droits d’un grand nombre d’autres personnes, notamment le droit à la vie, le plus important et le plus sacré, alors il ne s’agit plus d’une question de noblesse, mais tout simplement de démagogie.»
Et Poutine de continuer: «Personne n’a le droit de s’attribuer des pleins-pouvoirs onusiens, surtout s’il s’agit d’avoir recours à la violence contre des Etats souverains. C’est vrai tout particulièrement pour l’OTAN qui cherche à exercer des fonctions atypiques dans une ‹alliance de défense›. Tout ceci est plus que sérieux. Nous nous souvenons trop bien à quel point des Etats, qui avaient été victimes d’interventions ‹humanitaires› et de l’exportation de la ‹démocratie des missiles et des bombes›, avaient en vain appelé au respect du droit international et de la simple décence humaine.»
Poutine aborde aussi d’autres questions brûlantes de la politique mondiale: les événements en Afrique du Nord, ainsi qu’au Moyen et au Proche Orient, la question de la prolifération, la situation en Afghanistan, dans l’espace asiatique et pacifique, les relations entre la Russie et les Etats-Unis.

S’attaquer à la criminalité due à la drogue

Comme dans les années précédentes, il se déclare, notamment à propos de l’Afghanistan, en faveur de la lutte contre toutes sortes de criminalité due à la drogue: «L’avenir de l’Afghanistan nous réserve de grands soucis. Nous avons, comme on le sait, approuvé l’opération militaire pour le soutien international de ce pays. Toutefois, le contingent militaire international sous le commandement de l’OTAN n’a pas réussi à mener sa tâche à bien. Les menaces de terrorisme et les dangers relatifs à la drogue venant de l’Afghanistan ne sont pas réduits. […]
Les intérêts de la Russie en Afghanistan sont évidents. Ce pays ne se trouve pas loin de la Russie et nous avons tout intérêt à ce qu’il se développe de façon stable et pacifique. Le plus important est qu’il ne reste pas le pays de départ des dangers liés à la drogue. Le commerce illégal de la drogue est devenu une des pires menaces pour les bases génétiques des nations, provoquant de surcroît la corruption et la criminalité et favorisant la déstabilisation de la situation en Afghanistan même. Il faut se rendre compte que la production de drogue en Afghanistan ne diminue pas, mais qu’au cours de l’année dernière, elle a augmenté de presque 40%. La Russie se trouve confrontée à un déferlement d’héroïne qui porte gravement atteinte à la santé de notre population.
En prenant conscience de l’ampleur du danger afghan dû à la drogue, on se rend compte qu’on ne peut s’y opposer qu’en commun avec l’ONU et les organisations régionales telles que l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et la Communauté des Etats indépendants (CEI). Nous sommes prêts à soutenir de toutes nos forces toute opération en faveur du peuple afghan – toutefois à la condition que le contingent international en Afghanistan s’engage plus activement et prenne en compte nos intérêts, en procédant à la destruction des surfaces de culture de pavot pour la drogue et des laboratoires illégaux.
En plus de l’intensification des mesures prises contre la production de drogue en Afghanistan, il faudrait aussi mettre sérieusement un terme au transport de produits opiacés vers les marchés extérieurs, au financement du commerce de la drogue, et à la livraison de produits chimiques servant à la production d’héroïne. L’objectif est de mettre en place un système complet de sécurité anti-drogue dans la région. La Russie mettra tout en œuvre pour concentrer les efforts de la communauté internationale afin d’inverser la menace globale de la drogue.»
Dans la mesure où l’Europe saura re­trouver ses propres valeurs, elle pourra accepter tous les points évoqués par le nouveau président russe dans son offre de dialogue. Les peuples et les Etats de l’Europe ont intérêt au respect du droit international, à ce que tout Etat soit traité à égalité et voie ses droits respectés, que les Etats et les peuples coopèrent en paix, que le bien-être se développe et que les divers dangers liés à la drogue soient endigués.    •