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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°13, 6 avril 2009  >  La Grèce agit différemment que les Etats-Unis et l’OTAN [Imprimer]

La Grèce agit différemment que les Etats-Unis et l’OTAN

Un entretien avec Argyris Sfountouris

Horizons et débats: La Grèce est membre de l’OTAN et l’UE. Néanmoins, elle a adopté son propre point de vue quant à la question palestinienne. Son gouvernement a empêché qu’un navire allemand chargé d’armes de provenance américaine, qui avait accosté en Grèce, embarque sa cargaison dans des bateaux plus petits. Par conséquent, il a dû quitter le port. Comment s’explique cette position résolue de la Grèce?

Argyris Sfountouris: Dans ce domaine le gouvernement grec doit fortement tenir compte de l’opinion publique. Et la population grecque adopte depuis des décennies une attitude positive à l’égard du monde arabe. Il faut savoir que la Grèce a toujours eu de bonnes relations avec les pays arabes avec qui elle a depuis toujours entretenu d’excellentes relations. On avait des relations économiques très étroites et jusqu’au putsch de Nasser des centaines de milliers de Grecs ont vécu en Egypte et ont notamment contrôlé le commerce de coton. Ce sont de vieilles traditions qui retentissent. Cela s’est également manifesté lors de la guerre d’Irak. La Grèce a refusé d’envoyer des troupes en Irak. On a seulement mis à disposition un navire-hôpital et rien davantage. Certes, cette décision a été également prise parce que cette guerre sans mandat de l’ONU représentait une violation du droit international. La Grèce ne voulait pas se brûler les doigts, parce qu’elle a elle-même fait de mauvaise expérience avec des guerres d’occupation. La Grèce a appris quel malheur des conquérants peuvent causer. En ce qui concerne le blocage des livraisons d’armes, la Grèce ne veut absolument pas que les Palestiniens aient l’impression qu’elle soutient Israël.
De plus, en raison de la dictature (1967–74) en Grèce, on n’a guère de confiance envers les Etats-Unis. Les archives ont été ouverts 35 ans après le putsch. A cette occasion beaucoup de choses, dont on s’était déjà douté, se sont avérées: quelques mois avant le renversement certains services de la CIA étaient entrés en contacts directs avec le colonel du putsch tout en évitant les réseaux officiels de la CIA et des autres services secrets. C’était un plan secret de putsch manigancé par le gouvernement John­son. Tout cela était certainement en rapport avec la Guerre des six jours, qui a commencé juste quelques jours après le putsch. On voulait contrôler la région pour que rien d’inattendu n’arrive. Ensuite une dictature pure et dure s’est installée en Grèce pour sept ans bien que les Etats-Unis se soient toujours portés garants des droits humains et de la démocratie. C’était clairement un plan de l’OTAN qui avait été octroyé à la Grèce en tant que membre de l’OTAN. Cela explique la réserve de la population grecque à l’égard des Etats-Unis. Et plus le gouvernement est faible plus il doit prendre en considération l’opinion publique. Les derniers gouvernements étaient très faibles au niveau de la politique extérieure parce qu’ils avaient de gros problèmes à l’intérieur.

Argyris Sfountouris, né en 1940 en Grèce, est venu en Suisse en 1949 comme orphelin de guerre. Après avoir terminé ses études, il était d’abord enseignant, plus tard membre du Corps suisse d’aide humanitaire. A. Sfountouris est un
connaisseur de la politique grecque.