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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2010  >  N°3, 25 janvier 2010  >  «Nous ne pouvons nous contenter de nous en remettre à un groupe de vingt pays censément élus» [Imprimer]

«Nous ne pouvons nous contenter de nous en remettre à un groupe de vingt pays censément élus»

Discours prononcé par Doris Leuthard, présidente de la Confédération, devant le corps diplomatique accrédité en Suisse lors de la Réception de Nouvel-An

Monsieur le Nonce,
Madame la Conseillère fédérale,
Madame la Présidente du Conseil national,
Madame la Présidente du Conseil des Etats,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,
Vous connaissez tous notre Helvetia nationale, armée de sa lance et de son bouclier, et peut-être même avez-vous son effigie sur vous, puisqu’elle figure sur plusieurs pièces de monnaie, dont notamment la pièce de deux francs – et cela, sans que le motif ait connu la moindre altération depuis 1874!
Cette constance, est à mon sens l’une des caractéristiques de la Suisse. Certes, la crise économique et financière qui a secoué le monde l’an dernier ne nous aura pas épargnés, et nos entreprises auront, elles aussi, été frappées par la récession. Au point que la Suisse, comme d’autres pays, a dû se ré­soudre à apporter un soutien massif à l’un des acteurs majeurs de son secteur bancaire.
Il n’en reste pas moins que la Suisse, dans les vicissitudes de l’année 2009, s’est battue vaillamment: ainsi, lorsque le Conseil fédéral a décidé en mars de l’an dernier que la Suisse reprendrait la norme de l’OCDE sur l’échange d’informations en matière fis­cale, ce ne sont pas moins d’une douzaine de conventions de double imposition qui ont été adaptées au pas de charge, et d’autres sont appelées à suivre. Toujours en 2009, nous avons pu étendre à d’autres partenaires notre réseau d’accords de libre-échange, et nous avons notamment été le premier pays européen à conclure un tel accord avec le Japon. Enfin, main dans la main avec les cantons, la Confédération a pris des mesures de stabilisation prévues pour générer en 2009 et 2010 des impulsions conjoncturelles à hauteur de quelque 3% du PIB. Ce faisant, nous avons été particulièrement attentifs à ne pas nous laisser entraîner dans une spirale déficitaire grâce au garde-fou que représente le frein à l’endettement. C’est ainsi que la Suisse s’est hissée au rang de pays le plus compétitif du monde, et de pays le plus innovateur d’Europe.
Cette année encore, hélas, Helvetia devra fourbir ses armes pour relever des défis qui s’annoncent nombreux, et dont je n’en citerai ici que trois:
1.    D’abord, gérer l’après-crise financière de façon fiable. Suite aux événements de ces quinze derniers mois, il est hors de question de reprendre l’ordre du jour comme si de rien n’était. Au contraire, il s’agit de repenser le système international dans son entier, de mettre sur pied des règles applicables à tous les acteurs de la finance mondiale. Surtout, nous devons nous assurer que ces règles seront appliquées effectivement et partout.
Mais nous ne devons pas en même temps céder à une paranoïa qui verrait derrière chaque déposant un fraudeur en puissance; et derrière chaque banque, un complice: le Conseil fédéral est favorable à des mécanismes juridiques qui promeuvent la confiance et la transparence, mais qui soient déclenchables sur soupçon uniquement.
2.    Ensuite – deuxième défi –, mettre l’accent sur l’emploi. La Suisse a laissé quelques plumes dans la crise financière. Il lui faut maintenant se préoccuper de sa ressource la plus précieuse, qui est le capital humain. Plusieurs études affirment en effet que le chômage pourrait bien cette année, pendant plusieurs mois, franchir la barre des 5% (prévisions 2010: 4,9% en mo­yenne). Aussi le Conseil fédéral a-t-il d’ores et déjà adopté un train de mesures pour favoriser l’insertion ou la réinsertion rapide des jeunes et des chômeurs de longue durée: espérons qu’elles permettront d’amortir les chocs les plus rudes.
3.    Enfin – troisième défi –, tirer les leçons de la votation sur les minarets. Par son vote, le peuple s’est invité de manière inattendue dans un débat qui ne fait que com­mencer, et qui devra être mené jusqu’au bout. Ce débat porte sur la place de l’islam en Suisse et plus généralement sur l’intégration, qui, je l’affirme tranquillement, est pour tout nouvel arrivant un devoir. S’intégrer, ce n’est pas oublier d’où l’on vient et se renier pour embrasser aveuglément les coutumes du pays d’accueil: non, s’intégrer, c’est, au minimum, respecter les valeurs et les principes constitutionnels qui fondent nos institutions et notre société.
La crise financière, ne doit pas non plus nous dissimuler les foyers de crise qui parsèment le globe, sous la forme de conflits souvent armés qui se moquent bien des appels à la paix. D’autant que lorsque l’économie patine et que le chômage frappe, les tensions sociales, les luttes de répartition, voire les guerres, ne sont jamais loin. A cet égard, la Suisse se veut le promoteur d’une politique de paix active qui ambitionne à la fois de favoriser la compréhension mutuelle des cultures et points de vue, et de faire triompher le règlement pacifique des différends. C’est ainsi que l’an dernier, l’Arménie et la Turquie ont fait un pas l’une vers l’autre, dans le cadre d’un accord signé sur sol suisse: il va sans dire que si les Etats parties à d’autres conflits devaient le souhaiter, c’est volontiers que nous leur proposerions nos bons offices.
De même, la Suisse s’engage depuis toujours en faveur du désarmement et de la non-prolifération. Son objectif est aujourd’hui d’amener les puissances nucléaires à abaisser leur état d’alerte. Celui-ci, s’agissant des Etats-Unis et de la Russie, n’a pas changé depuis la guerre froide, si étonnant que cela puisse paraître.
Un autre sujet de préoccupation est la difficulté croissante que rencontre la communauté internationale à s’accorder sur des engagements fermes. Ainsi, voilà déjà plus de huit ans qu’a débuté, sous l’égide de l’OMC, le cycle de Doha, et les négociations continuent. De nombreuses conventions de l’OIT [Organisation internationale du travail] ne sont toujours pas ratifiées. Les «objectifs du Millénaire» paraissent bien loin. Et même la Conférence de Copenhague sur le climat n’a pas débouché sur un accord contraignant… Faut-il envisager un changement de para­digme, et si oui lequel, pour rapprocher les positions apparemment antagonistes des pays industriels et des pays en développement? Quelle que soit la réponse, tant que la dispute ne laissera pas la place à l’action, nous continuerons tous de souffrir de la dégradation climatique et de catastrophes naturelles en nombre croissant. La seule bonne nou­velle aura été que la communauté internationale s’est fixé pour objectif de contenir le réchauffement de la planète à 2° C par rapport au début de l’ère industrielle.
Helvetia ne pourra, à elle seule, résoudre tous ces problèmes. Et l’Oncle Sam ne le pourra pas non plus, pas plus que ne le pourront la Mère Russie ou Marianne. Il est de notre responsabilité collective d’apporter à une crise globale, une réponse globale: aussi est-ce la «famille» tout entière qui doit se retrousser les manches, en veillant à n’ex­clure personne. Nous ne pouvons nous contenter de nous en remettre à un groupe de vingt pays censément élus, surtout si leurs actes ne sont pas à la hauteur de leurs déclarations, voire les contredisent. La Suisse veut, elle aussi, avoir son mot à dire et prendre sa part de l’effort commun, comme doit pouvoir le faire n’importe quel pays.
Loin d’être un vœu pieux, cette volonté de participer activement à la marche du monde est déjà une réalité: ainsi, jusqu’au mois de mai, nous présiderons le Conseil de l’Europe; à l’automne, nous accueillerons le Sommet de la francophonie, qui se tiendra à Montreux; et en septembre, c’est un Suisse qui présidera vraisemblablement la 65e Assemblée générale des Nations-Unies.
Antoine de Saint-Exupéry disait que l’avenir n’est pas à prévoir, mais qu’il est à bâtir. C’est là très exactement notre vision des choses, et nous voulons être de ceux qui bâtiront l’avenir – l’avenir pour tous.    •

Source: www.admin.ch du 13/1/10

Les représentants diplomatiques de 124 Etats ont témoigné leur amitié à la Suisse

thk. Le 13 janvier a eu lieu au Parlement fédéral la réception traditionnelle du corps diplomatique à l’occasion de la nouvelle année. Des représentants de 124 pays ont présenté personnellement leurs vœux et honoré la Suisse. Plusieurs ambassadeurs ont déclaré, dans des entretiens personnels, que c’était une joie pour eux d’y participer.
La tradition veut que le Président de la Confédération souhaite personnellement la bienvenue à chaque ambassadeur et re­çoive ses vœux. Cette année, le dialogue court mais intense de la Présidente avec les représentants des pays en développement a été tout à fait frappant. Il s’est avéré qu’ils ont une relation de confiance particulière avec notre pays qui, par sa tradition humanitaire, s’est fait un nom dans la communauté internationale et suscite des espoirs.
Le foyer du Palais fédéral, où, normalement, c’est la politique quotidienne qui détermine le contenu des entretiens, a accueilli pour une fois le corps diplomatique international et les représentants de tous les pays s’y sont sentis visiblement à l’aise. On a pu observer que même des représentants de pays peu amis ont mené des dialogues intenses: le foyer du Palais fédéral était un lieu où se créait la confiance internatio­nale.
Selon la tradition, le doyen du corps diplomatique, le nonce apostolique Francesco Canalini, a prononcé, au nom de toutes les personnes présentes, une allocution dans laquelle il a notamment assuré à la Suisse son soutien dans ses activités en faveur de la paix. Ensuite, la Présidente de la Confédération Doris Leuthard a évoqué la catastrophe d’Haïti et a demandé d’observer une minute de silence à la mémoire des victimes. Puis elle a rendu hommage à la politique suisse de l’année dernière et fait indirectement l’éloge de son prédécesseur Hans-Rudolf Merz. Elle a souligné la volonté de la Suisse de «contribuer par sa politique de paix à une meilleure compréhension entre les peuples et à un règlement pacifique des conflits». Elle a critiqué les pays du G 20 et souhaité que tous les Etats puissent participer à la solution des problèmes mondiaux en suspens. Elle a rendu hommage aux valeurs fondamentales de la Suisse: engagement en faveur de la paix et de l’entente entre les peuples et attachement à la démocratie.
Après ces deux discours, la partie protocolaire était terminée et le corps diplomatique s’est disséminé dans le foyer où, tout en buvant l’apéritif, il a mené des entretiens d’Etat à Etat: invitation au dialogue, selon la tradition suisse.