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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2011  >  N°29, 25 juillet 2011  >  Le «Mécanisme européen de stabilité financière» va-t-il stabiliser l’euro? [Imprimer]

Le «Mécanisme européen de stabilité financière» va-t-il stabiliser l’euro?

par Eike Hamer, éditeur de Wirtschaft aktuell (www.mittelstandsinstitut-niedersachsen.de)

A partir de 2013, le «Fonds de sauvetage» institué par les fonctionnaires de l’UE va être remplacé et renforcé par le Mécanisme européen de stabilité financière (MES). Qu’est-ce qui se cache là derrière?
Un fonds, dont le capital total a été fixé pour le moment à 700 milliards d’euros (art. 8 de l’accord) et que les Etats membres doivent, à la demande de la direction, approvisionner sans conditions et irrévocablement (art. 8–4 et art. 9).
Il n’est soumis à aucun droit national (art. 1 et 27). Avec ses collaborateurs, il jouit de l’immunité (art. 30). Il n’est assujetti à aucun impôt sur les sociétés et sur le revenu et ne peut être traduit en justice par personne parce qu’il n’existe pas de tribunal compétent dans le monde.
Son organe de surveillance, le Conseil des gouverneurs, n’est pas élu mais nommé; il ne doit rendre de comptes à personne et, grâce à sa taille (34 membres), il peut être considérablement manipulé par son directeur administratif et son administration. Ce Conseil des gouverneurs nomme un Directoire tout aussi important (art. 6) et le directeur administratif, qui a des compétences étendues. Par exemple, il est le seul à pouvoir donner des instructions aux collaborateurs (art. 7). Il peut agir à sa guise au nom du fonds, pour le compte des Etats membres, sans pouvoir être poursuivi en justice. Il peut prendre des crédits illimités – également auprès de banques privées (art. 17) – dont les Etats membres répondent solidairement et qu’ils peuvent être obligés de réapprovisionner selon leur quote-part. Ainsi, si le capital du fonds ne suffit plus, le Conseil des gouverneurs peut l’augmenter de sa propre autorité sans risquer d’être traduit en justice (art. 10).
Comme seul le directeur administratif a le droit de donner des instructions aux collaborateurs, il peut faire l’usage qu’il veut du fonds et ne peut être traduit en justice. Il a même la possibilité de racheter des emprunts d’Etat (monétarisation par la bande), d’effectuer toutes sortes de manipulations sur le marché des capitaux ou de soutenir d’autres institutions, même si cela enfreint les lois nationales, les statuts de la Banque centrale européenne ou les principes de l’économie de marché. Grâce à son immunité générale, il ne peut pas être traduit en justice.
Avec cet accord, avec cette institution de fonctionnaires de l’UE échappant à tout contrôle démocratique et jouissant de l’immunité juridique, les membres de la zone euro emmenés par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont procédé à une mainmise illimitée sur les budgets nationaux. Aussi cette procédure inconditionnelle et irrévocable peut-elle être considérée à juste titre comme un accord de pleins pouvoirs. Il permet la mainmise absolue sur les budgets nationaux, autorise des interventions sur le marché impossibles à contrôler démocratiquement et juridiquement et met un terme à la souveraineté des Etats sur leurs budgets. Le dernier domaine dépendant de la souveraineté des Etats, le droit budgétaire et, finalement, également la Constitution allemande s’en trouvent annulés. Le fait qu’Angela Merkel ait consenti à cet accord, qui ressemble à un putsch, sans consulter le Parlement au préalable est non seulement un scandale mais signifie la dissolution des Etats nations souverains de l’UE et la création d’une union de dettes et de transfert dans toute l’Europe. Les rapports de pouvoir qui existaient jusqu’ici entre l’UE et ses Etats membres se renversent. Ce ne sont plus les fonctionnaires de l’UE qui doivent demander des programmes, ce sont les Etats membres qui doivent mendier des retours de capitaux et accepter les directives arbitraires des fonctionnaires de l’UE – qui échappent à tout contrôle démocratique et ne peuvent pas être traduits en justice – et les imposer aux peuples. Il en résulte que la souveraineté des Etats membres est devenue caduque.
A l’avenir, peu importera qui les peuples élisent pour les représenter. Les décisions seront prises par des fonctionnaires de l’UE qui échappent à tout contrôle démocratique et ne peuvent pas être traduits en justice.
Avec la création du MES, trois évolutions se dessinent:
1.    La prise du pouvoir par les fonctionnaires de l’UE sur les Etats membres qui étaient souverains jusqu’ici et par conséquent l’abolition de la démocratie en Europe.
2.    L’incitation pour les pays membres de l’UE à faire des dettes de manière effrénée parce que ce sont avant tout les citoyens sérieux et performants qui devront passer à la caisse en raison de l’union de dettes introduite par le MES.
3.    La fin prévisible de l’euro et de l’UE parce que les citoyens ne toléreront pas éternellement ce pillage et cette «dédémocratisation» programmés.
Il va être difficile de justifier cette prise de pouvoir contractuelle au regard des diverses constitutions des pays européens. A vrai dire, aucun démocrate ne peut approuver cet accord.    •

On trouve le texte de l’accord à l’adresse suivante: www.freiwelt.net

P.S. Dans les rangs du groupe parlementaire de la majorité gouvernementale, une opposition se fait jour en partie ouvertement et en partie en coulisses. En effet, un vrai démocrate ne peut pas approuver l’abandon de la souveraineté. Depuis longtemps, la majorité gouvernementale que Steinmeier, évidemment conscient du fait, a déjà réclamée expressément, n’existe plus. C’est pourquoi le gouvernement augmente la pression sur ses députés. Des quantités d’entretiens personnels sont organisés afin de recadrer les candidats hésitants. Mais il semble qu’une opposition se dessine au sein de la base également. Sur le forum Internet AbgeordnetenCheck.de (www.abgeordneten-check.de/karte.html?c=69), chacun a la possibilité soit de signer une pétition déjà préparée soit d’envoyer un courriel à son député pour l’inviter à résister aux pressions venues d’en haut, à marquer son opposition au bradage de la souveraineté allemande, à faire stopper l’accord sur le MES. Il est souhaitable que la pression de la base soit, pendant les vacances, suffisamment forte pour que l’on évite le pire.