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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2012  >  N°48, 19 novembre 2012  >  Ce que nous, les citoyens des Etats européens, pourrions exiger des USA … et de nos propres gouvernements [Imprimer]

«Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.»
Article 1, alinéa 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Ce que nous, les citoyens des Etats européens, pourrions exiger des USA … et de nos propres gouvernements

par Karl Müller

Le jour des élections présidentielles aux Etats-Unis, la «Frankfurter Allgemeine Zeitung» a publié une interview avec le néoconservateur éminent Robert Kagan, qui était en même temps le conseiller en matière de politique extérieure du candidat républicain aux présidentielles, Mitt Romney. Le fond de l’interview était la déclaration que les USA garderaient aussi au XXIe siècle leur position dans un monde unipolaire, dominé par eux. Un monde multipolaire, et même un monde d’Etats égaux en droits, ne serait «ni stable ni pacifique»; car il n’y aurait plus de «policier mondial». Ce que les USA devraient faire de plus important, serait de maintenir le budget militaire au moins à l’état actuel.
Robert Kagan fait partie de ces Américains qui, depuis bien des années, disent sans détour ce qu’ils pensent du reste du monde, et qu’il ne peut rien arriver de meilleur au monde que de se soumettre à la politique des USA. Et il faut ajouter: même si les formulations et le style varient suivant la couleur, c’est dans le fond la vraie conviction de la majeure partie des élites américaines.
Au plus tard depuis Kishore Mahbubani, nous savons cependant que presque 90% du monde ne pensent pas ainsi. Mais qu’en est-il de l’Europe? Et qu’exigeons-nous, citoyens des Etats européens?
Nous pourrions féliciter Barack Obama pour sa réélection, mais aussi dire clairement ce que nous exigeons.
Nous pourrions exiger que l’histoire européenne depuis la Seconde Guerre mondiale soit retravaillée – de manière obligée à la vérité. Récemment un collaborateur scientifique de la fraction de la Gauche au Parlement européen, Andreas Wehr («Die Europäische Union», 2012, ISBN 978-3-89438-498-2), a essayé de faire un tel travail et il est arrivé au résultat que ce qui, plus tard, est devenu l’Union européenne n’a jamais été un projet européen, mais américain. Et cela non pas pour assurer la paix en Europe, mais avant tout pour pouvoir mieux imposer les intérêts économiques et financiers des USA.
Nous pourrions exiger que les Etats-Unis respectent la Charte des Nations Unies, c’est-à-dire qu’ils renoncent aux guerres d’agression et qu’ils respectent l’égalité et la souveraineté de tous les Etats de ce monde.
Nous, les citoyens des Etats européens pourrions exiger des Etats-Unis qu'ils ferment toutes les bases militaires en dehors de leur pays, et qu'ils limitent à ce qui est le droit et le devoir de tout pays: de stationner des troupes uniquement dans son propre pays et de ne dépenser pour l’armée que ce qui est nécessaire pour la défense du pays.
Nous pourrions également exiger que les Etats-Unis n’utilisent à l’avenir dans leur politique extérieure ni hard power, ni soft power ni smart power, mais qu’ils commencent à régler leurs relations avec d’autres pays au moyen de négociations ouvertes et sur un pied d’égalité. C’est aussi valable lorsque un américain désire acquérir des matières premières d’autres pays.
Nous, les citoyens des Etats européens pourrions exiger que les Etats-Unis arrêtent de développer des armes à destruction massive de plus en plus terribles et qu’ils prennent, au lieu de cela, des initiatives de désarmement honnêtes et sérieuses.
Nous pourrions exiger que les Etats-Unis arrêtent de déstabiliser d’autres Etats. Nous en Europe, conscients des signes avant-coureurs de toutes les guerres, nous connaissons les tentatives de décomposer et de diaboliser d’autres Etats et gouvernements. De telles représentations hostiles des autres Etats n’ont plus de place dans un monde qui devrait s’unir de façon pacifique et égalitaire.
Nous pourrions exiger que la politique américaine soit aussi tenu d’accepter que chaque pays règle l’ordre économique d’après la volonté de son propre peuple. C’est le seul principe qui correspond au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, également ratifié par les Etats-Unis. On peut lire dans l’article 1, alinéa 1: «Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.»
Il n’existe aucun argument convaincant expliquant pourquoi le désordre de l’économie mondiale devrait continuer ainsi. Et non plus pourquoi chaque pays devrait maintenir une sorte de capitalisme qui ne sert qu’à une minorité, qui n’est pas équitable et qui rend impossible la paix dans le monde.
Evidemment nous, les citoyens d’Etats européens, pourrions exiger encore bien des choses, pour que la politique des Etats-Unis ne suive plus les directives d’un Robert Kagan dans les années à venir, mais travaille à l’avènement d’un monde plus pacifique et plus équitable socialement.
Et à toutes ces exigences nous ajouterons bien sûr nos vœux pour que les Etats-Unis apportent la paix et la justice aussi à leur propre peuple.
Finalement nous devrions aussi exiger de nos propres gouvernements en Europe tout ce que nous exigeons des USA. Nous devrions prononcer de telles exigences avec insistance pour que les gouvernements des Etats européens se retrouvent bientôt aux côtés de leurs citoyens. Cela serait très important aussi pour l’avenir de la politique des Etats-Unis.    •