«Défendre son propre espace aérien de manière souveraine et indépendante»Pourquoi le Gripen est d’importance majeure pour la Suissepar Thomas KaiserL’histoire des forces aériennes suisses est mouvementée, et l’on peut parler d’ironie du sort que juste 100 ans après leur fondation a lieu une votation qui va décider du maintien de ce pilier important de l’armée. Par l’émission d’une monnaie commémorative officielle et deux timbres commémoratifs, on rappelle le souvenir de la pose de la première pierre des forces aériennes et de l’équipe de vol acrobatique Patrouille Suisse il y a 50 ans. Voici un bref aperçu historique de la naissance, du développement et de la signification des forces aériennes. Le Conseil fédéral a ordonné «un premier détachement d’avions suisse»A ce moment-là, l’Armée suisse n’était que partiellement préparée à une grande guerre qui, étant donné l’hostilité franco-allemande, aurait pu facilement avoir lieu sur le territoire suisse. Des forces aériennes performantes n’existaient pas au début de la guerre. Certes des Suisses faisaient partie des pionniers de l’aviation, on se souvient en particulier d’Oskar Bider (cf. Horizons et débats, no 15 du 28/4/13), mais à ce moment-là on n’avait pas encore reconnu l’avantage militaire. Le 31 juillet 1914, la situation change du jour au lendemain par la mobilisation générale de l’Autriche-Hongrie. Le capitaine Theodor Real, pilote et officier instructeur de cavalerie reçoit du Conseil fédéral l’ordre de mettre sur pied un groupe d’aviation. Le 3 avril déjà, après la déclaration de guerre des Allemands à la France, le Conseil fédéral ordonna le «premier détachement d’avions suisse». Le capitaine Real leva avec 10 pilotes et 8 avions la première troupe aérienne suisse. A ce moment-là, la plupart des avions étaient en possession privée et le nombre des machines à disposition était extrêmement modeste. Certes, les forces aériennes ne jouèrent d’abord qu’un rôle subordonné et ne s’imposèrent pas comme décisives dans le combat, pourtant la signification du combat aérien, de la reconnaissance aérienne et le soutien au combat sur terre continua à augmenter. Et les forces aériennes sont devenues au cours du temps, à côté des forces terrestres et de la marine, une force armée importante. Etablissement d’une défense antiaérienne opérationnelleLe réarmement d’abord secret, puis de plus en plus ouvert de l’Allemagne des années 30 mena en Suisse au renforcement et à l’expansion des forces aériennes ainsi qu’à la création d’une défense contre avions opérationnelle dirigée par un divisionnaire. En 1936, le Conseil fédéral déclara la troupe d’aviation arme à part entière. Défense de la souveraineté et neutralitéLa défense de l’espace aérien joua et joue encore un rôle décisif dans la stratégie de guerre. Au cours du seul mois de février 1945, il y eut 491 violations de l’espace aérien suisse de la part des alliés et des puissances de l’Axe. Outre ces violations de l’espace aérien, qui ont pu être parées grâce à une défense aérienne et des forces aériennes opérationnelles, ce qui nous a épargné de plus grands dégâts, le pays dut toujours s’attendre à une invasion de troupes étrangères. Lors de la Seconde Guerre mondiale, les forces aériennes suisses étaient impliquées dans des combats aériens avec l’armée de l’air allemande ainsi qu’avec celle des Alliés pour défendre la souveraineté Des guerres menées essentiellement par des forces aériennesSi nous analysons aujourd’hui, 25 ans après la fin de la guerre froide, la conduite moderne de la guerre des Américains et de leurs alliés, nous devons constater que les forces aériennes en sont devenues un facteur tout à fait décisif. Déjà lors de la guerre du Vietnam l’armée de l’air américaine a largué trois fois plus de bombes qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale. De même les guerres d’Israël et de l’OTAN des 20 à 25 dernières années ont été menées essentiellement par des forces aériennes. Lors de la guerre de Libye en 2011, l’OTAN n’a mené pas moins de 20 000 opérations aériennes. Il est donc tout à fait naïf et dépourvu de tout sens de réalité de prétendre que notre pays n’a plus besoin de défense aérienne puisque les grandes guerres ne sont plus d’actualité. Un seul regard en direction l’Ukraine nous détrompe, à savoir comment, sous l’influence de forces externes, nottament de l’UE et des Etats-Unis, un pays peut soudainement se retrouver dans une situation où la guerre est toujours dans l’air. Il y a un an la majorité des gens aurait dit qu’en Europe la guerre n’est plus possible, mais l’attention était focalisée surtout sur le Proche-Orient. Qui ose émettre des prédictions pour les prochaines 5 années à venir? Bibliographie: Patrouille Suissethk. Au beau milieu de la guerre froide, on a fondé, en 1964 lors du 50e anniversaire des forces aériennes et à l’occasion de l’exposition nationale à Lausanne, l’équipe de vol acrobatique Patrouille Suisse. C’était une combinaison de la précision helvétique et de la volonté de se défendre et a démontré, vers l’intérieur comme vers l’extérieur, la détermination face à tout agresseur potentiel. L’idée de montrer les capacités aéronautiques du pays à un large public est née en 1959. Deux doubles patrouilles du Hunter britannique durent s’entraîner pour des buts de démonstration. Elles ont démontré leur savoir-faire lors de l’exposition nationale, et ce fut l’heure de naissance de la Patrouille Suisse qui, respectant strictement la neutralité, ne pouvait être vue que dans notre pays jusqu’en 1978. Au cours du temps, aux quatre avions s’en sont ajoutés deux autres, et au lieu du Hunter, on s’est entraîné depuis 1995, sur le Tiger, qui était plus rapide et plus agile. |