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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2008  >  N°12, 25 mars 2008  >  La maladie de la langue bleue: «Hidden agenda» ou quoi d’autre? [Imprimer]

La maladie de la langue bleue: «Hidden agenda» ou quoi d’autre?

Faibles rendements, réactions de dilettantes, procédure chaotique

par Sebastian Schäfer, Bioland Schäferhof, Marienheide

Quand je pense aux événements relatifs à la maladie de la langue bleue et du développement du droit vétérinaire des derniers mois et années, je n’en peux tirer qu’une conclusion: Faibles rendements, réactions de dilettantes, procédure chaotique.
•    Comment se fait-il qu’en Allemagne, le pays européen le plus concerné avec plus de 20 000 cheptels touchés et des dizaines de milliers de bêtes mortes, on n’ait initié qu’à la mi-janvier 2008 un processus de mise en adjudication sur environ 16 millions de doses de vaccin contre la langue bleue? La Grande Bretagne avait placé sa commande fixe de 22,5 millions de doses le 19 décembre, également après une mise en adjudication préalable; à ce moment-là seulement 66 cas confirmés y avaient été enregistrés. La France avait déjà commandé son vaccin en novembre.
•    Qui m’expliquera le fait que, selon le nouveau règlement sur le trafic d’animaux en vigueur depuis juillet 2007, les dispositions réglementaires concernant la déclaration d’inventaire du cheptel à la banque de données HIT n’aient jusqu’à aujourd’hui pas été communiquées à tous les propriétaires de moutons, et que par exemple la Rhénanie-du-Nord-Westphalie se voie dans l’impossibilité d’entreprendre ce processus de déclaration pour les détenteurs de moutons et de chèvres sans accès à Internet?
•    Qui est responsable du fait que durant les trois dernières années trois marquages de l’oreille différents aient été ordonnés mais que jusqu’à présent une bonne partie de nos moutons ne soient toujours pas marqués? Pendant ce temps une quatrième procédure décidée depuis longtemps, le marquage électronique, a été reportée de deux ans parce qu’on ne peut pas se mettre d’accord sur le système approprié.
Il y a une réponse à toutes ces questions: Pendant que dans les autres pays cités l’élevage de moutons représente un facteur non négligeable de l’économie, en Allemagne il est presque sans importance économique. L’élevage de moutons n’est pas seulement le dernier wagon du train de l’agriculture, mais ce wagon a déjà été décroché et mis sur la voie de garage, sans attention, sans être pris au sérieux et déjà presque oublié.
Même une manifestation à Berlin n’y change rien; la plupart des politiciens se sont frotté les yeux, un peu étonnés de voir ces individus étranges dans leur manteaux de berger que l’on aperçoit d’habitude seulement lors de fêtes du patrimoine ou dans les musées. Qui veut déjà investir dans une branche économique débranchée?! Il s’agit en premier lieu d’argent dans ces manquements: Si nous ne vaccinons pas tous les animaux utiles qui peuvent être contaminés, on n’aura aucune chance de jamais faire disparaître la maladie de la langue bleue. Cela coûte de l’argent! Qui veut établir la procédure HIT à court terme sans mettre à disposition les moyens nécessaires ne doit pas s’étonner du chaos.
Sans campagne d’information convaincante pour le marquage, sans mise à disposition gratuite des marques d’oreille (électroniques) il n’y aura pas de marquage accepté et pratiqué.
Où sont les experts qui indiquent la direction à prendre et qui font avancer l’élevage de moutons? La plupart d’entre eux sont à la retraite, et à l’université l’élevage de moutons n’existe quasiment plus dans la recherche. Qui n’est pas prêt à investir de l’argent dans la recherche et dans l’enseignement ne doit pas s’étonner du manque d’innovations.
L’Allemagne, le pays des bureaucrates incapables? Je ne veux pas reprocher toutes les fautes à la politique et à l’administration. Même si c’est la structure fédérale qui contribue largement au chaos dans le domaine vétérinaire et aux situations grotesques, ce sont aussi les éleveurs de moutons eux-mêmes, leurs organisations et leur partenaires du marché, qui avec une rentabilité qui s’est amenuisée pendant les dernières décennies, se sont retirés des événements et ainsi de la sphère d’influence. Quand on ne peut plus nourrir une famille avec les moutons, les bergers et leurs troupeaux disparaissent. Avec les seuls éleveurs amateurs pour maintenir la diversité génétique, un des plus anciens métiers se retrouve dépendant des subventions de l’Etat attribuées.
Pour gagner un nouvel élan et rétablir la conscience de sa propre valeur, nous devons de nouveau gagner de l’argent avec nos moutons. C’est possible également de nos jours, bien que cela soit devenu bien plus difficile que dans les années 1960 et 1970. Celui qui avait bien travaillé à cette époque-là pouvait gagner une petite fortune avec les moutons.
Aujourd’hui il faut davantage que de l’application, un berger doit être spécialiste dans son métier. Des bêtes en bonne santé, peu de pertes, une haute productivité et une commercialisation habile sont aujourd’hui les clefs d’un élevage de moutons couronné de succès. Par contre nous attendons également que les administrations ne nous bloquent et ne nous gênent pas, et que nos organisations nous aident dans la mesure du possible sans user leurs forces dans l’administration de ­règlements insuffisamment élaborés. Justement à présent, à une époque où l’alimentation regagne sa valeur et que l’économie proche de la nature est demandée, où des produits spéciaux et sains connaissent du succès, la viande d’agneau et les produits des moutons de haute valeur devraient rapporter de l’argent. Si nous réussissons à servir les besoins du marché, je vois des chances dans le segment des prix élevés.
Nous devons trouver une nouvelle orientation et gagner outre nos clients musulmans, des clients exigeants et haut de gamme. Pour cela la production devra devenir plus homogène, une offre devra être créée avec un marketing raisonnable. Des programmes régionaux de marques de viande d’agneau existants montrent que c’est possible.
Pour cela nous, les éleveurs de moutons, devons être prêts à prendre des risques d’entrepreneur, au lieu de faire appel à l’Etat. Nous devrions appliquer les techniques modernes qui sont à disposition, de manière appropriée et là où c’est sensé. Je cite comme exemple les examens de gestation par ultrason qui ont été présentés ces derniers mois et qui apportent des avantages économiques clairs et également le génotypage quant à la résistance au piétin, maladie du pied du mouton.
Et pourquoi ne reconnaissons-nous par exemple pas les chances que le marquage électronique présente pour le management des troupeaux? Trier, sélectionner, peser et nourrir les animaux – les possibilités dépassent de loin les exigences de la loi concernant l’identification et la documentation. Pour cela de tels systèmes doivent également être aptes à la pratique; c’est là que les éleveurs de moutons devraient s’engager au lieu de se contenter de manière défensive d’un terrain d’entente minimale et de consentir à ce qui est inévitable, c’est-à-dire à des compromis boiteux.
La maladie de la langue bleue a occasionné beaucoup de souffrance et de pertes aux éleveurs de moutons. Mais elle nous a également rapprochés d’un bon bout. Chaque crise apporte aussi le germe de nouvelles chances – si nous savons les saisir.    •

Source: Schafzucht. Das Magazin für Schaf- und Ziegenhalter, 5/08
(Traduction Horizons et débats)