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18 juillet 2016
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Horizons et debats  >  archives  >  2009  >  N°35, 7 septembre 2009  >  La violence juvénile est plus importante qu’on le croyait jusqu’ici [Imprimer]

La violence juvénile est plus importante qu’on le croyait jusqu’ici

Rapport de recherche de l’Institut de criminologie de l’Université de Zurich

thk. Grâce à l’étude saint-galloise rendue publique le 24 août, nous disposons maintenant d’un sondage représentatif sur la violence chez les jeunes. Ses résultats font réfléchir. Ils montrent qu’il faut agir de toute urgence. Le gouvernement du canton de Saint-Gall avait commandé cette étude à l’Institut de criminologie de l’Université de Zurich, démarche pionnière qui pourrait profiter à tous les autres cantons. Les principaux résultats de cette recherche sont présentés dans le communiqué de presse que nous publions ci-dessous.
Pour les membres de la Vereinigung gegen mediale Gewalt (VGMG), cette étude constitue un soutien de son travail. Cette association a été fondée dans le but de s’opposer à la violence médiatique (cf. encadré p. 4) et de proposer des modes pacifiques de résolution des conflits. La présentation de l’affaire du Muotathal éclaire le contexte de ce crime et en recherche les causes.
Ceux qui ont lu l’ouvrage d’Udo Ulfkotte «Vorsicht Bürgerkrieg» peuvent se faire une idée de ce à quoi la société actuelle est confrontée. Les exemples de ce qui se passe dans les pays voisins sont effrayants mais ils sont les signes d’une évolution qui se dessine également chez nous. Les recherches d’Ulfkotte recoupent non seulement l’étude saint-galloise mais aussi un sondage auprès des polices cantonales et municipales que le Département fédéral de Police et de justice avait commandé en 2007 et dont les résultats ont été publiés en juillet dernier. Les faits signalés par les différentes polices correspondent largement aux résultats de l’étude saint-galloise et en confirment les conclusions.
Maintenant, les autorités et toutes les personnes concernées – parents, enseignants, éducateurs – ne peuvent plus fermer les yeux car les effets et les causes sont ici évidents.
Environ 26% des élèves de 3e secondaire du canton de Saint-Gall déclarent avoir au moins une fois par le passé commis un acte de violence (coups et blessures, participation à une bagarre en groupe, vol, violence sexuelle). Tel est le résultat le plus important d’un rapport de recherche de l’Institut de criminologie de l’Université de Zurich qui a été présenté aujourd’hui au public par deux membres du Conseil d’Etat, Karin Keller-Sutter et Stefan Kölliker.
En janvier 2008, le Département de la Sécurité et de la justice, ainsi que le Département de l’Education du canton de Saint-Gall ont commandé à l’Institut de criminologie de l’Université de Zurich une étude scientifique sur l’ampleur de la délinquance juvénile au sein des écoles et à l’extérieur. Il s’agissait également d’étudier les causes de cette violence. Tous les élèves – filles et garçons – des classes de 3e secondaire ont été inter­rogés au moyen d’un questionnaire anonyme sur Internet.

Les actes de violence ont lieu surtout dans l’espace public

Le professeur Martin Killias (chaire de droit pénal, de droit de la procédure pénale et de criminologie de l’Université de Zurich), directeur scientifique de cette recherche, et Simone Walser, cheffe de projet et rédactrice du rapport, ont présenté lors de la conférence de presse d’aujourd’hui une étude tout à fait représentative. 5200 questionnaires ont pu être analysés, ce qui correspond à 83% de l’ensemble des élèves de 9e année de scolarité. Les questions portaient aussi bien sur les actes de violence commis que sur les actes subis. Le taux de 26% de jeunes qui avaient jusque-là commis au moins un acte de violence est nettement plus élevé que les chiffres officiels qui n’enregistrent que les délits ayant fait l’objet d’une plainte. Il correspond étonnamment bien au pourcentage de jeunes déclarant avoir été victimes au moins une fois d’un acte de violence par le passé.
Pour la prévention, il est important de savoir où, quand et comment sont commis les délits de violence. Il s’avère que la plus grande partie d’entre eux, c’est-à-dire environ 73%, sont perpétrés dans l’espace public: dans les rues, sur les places, dans les gares, les restaurants, les centres commerciaux et lors de soirées. La part des délits commis dans les écoles – 16% – est relativement faible. Une analyse plus approfondie montre que la majorité sont commis le soir et la nuit (à partir de 20 heures), que davantage de délits sont commis en groupe et sous l’influence de l’alcool et des drogues et que l’usage des armes augmente.

Causes et facteurs positifs

En ce qui concerne la fréquence des délits, les résultats de cette étude sont comparables à ceux d’autres cantons et d’une étude relative à l’ensemble du pays. Quant aux causes, les chercheurs ont découvert un certain nombre de faits importants: la violence des jeunes est corrélée avec des familles incomplètes, l’immigration, les mauvais résultats scolaires, un faible contrôle parental, de fréquentes sorties le soir, la consommation d’alcool et de drogues de même que le laisser-aller en matière de travail scolaire. Inversement, les familles «classiques», celles où les parents imposent des règles claires, constituent un facteur protecteur: Les jeunes dont les parents savent avec qui leurs enfants sortent le soir et où ils vont, qui conviennent avec leurs enfants d’heures de rentrée bien définies sont significativement moins violents.

Missions de l’Etat et de la famille

Karin Keller-Sutter, cheffe du Département de la Sécurité et de la justice, tire trois conclusions de cette étude. Premièrement, comme la plupart des délits de violence ont lieu dans l’espace public, il appartient avant tout à la police et à la justice de garantir la sécurité publique. Cela suppose des effectifs policiers suffisants et également des concepts de prévention, d’investigation et de poursuites adéquats. Dans ce domaine, avec l’augmentation des effectifs de la police, avec le Service Jeunesse de la police et les offices de mineurs composés de représentants de diverses disciplines, le canton est bien «doté». Deuxièmement, il existe un problème lié à l’immigration. Il faut ici que le canton prenne des mesures pour favoriser l’intégration mais aussi tirer des conséquences – mesurées – en matière de législation sur les étrangers. Troisièmement, étant donné que la famille et un contexte social fixant des règles constituent des facteurs positifs, la responsabilité individuelle et collective occupe une place centrale. Les organes et les autorités étatiques ne peuvent intervenir qu’à titre d’adjuvant lorsque le contexte social n’a pas pu empêcher les dérives.

Créer des liens affectifs à l’égard de l’école

Stefan Kölliker, chef du Département de l’Education, constate que les liens affectifs des jeunes à l’égard de l’école sont le plus important facteur scolaire positif. Plus l’attitude des jeunes à l’égard de l’école est positive, c’est-à-dire plus ils aiment l’école, moins grand est le risque qu’ils recourent à la violence à l’école et à l’extérieur. L’école peut grandement contribuer à réduire la violence, tout d’abord en fixant des règles de comportement claires et en les imposant de manière rigoureuse. En effet, les règles n’ont un effet positif que si on en impose le respect. En outre, le Département de l’Education va développer l’année prochaine un concept de prévention et poursuivre les projets déjà en route comme le programme «Sicher!Gsund!» grâce à des documents et à des séances de formation continue pour les enseignants, le projet de prévention de la violence «Faustlos» (jardins d’enfants et école primaire) et le programme de prévention des drogues «Freelance» (degré secondaire).
Pour le chef du Département de l’Education, il faut également agir dans le domaine du sport car l’étude a révélé qu’il n’avait malheureusement guère d’effet préventif sur la violence. Dans le sport scolaire et les manifestations de Jeunesse et Sport, les règles doivent être mieux respectées.

Et la suite

Cette étude sert aux départements cantonaux de base pour l’étude des propositions parlementaires en vue d’une politique de prévention de la violence juvénile qui ont été déposées lors de la session de juin 2008. Les lacunes révélées par la présente recherche seront analysées. Les deux départements concernés ont l’intention de soumettre leur rapport vers la fin de l’année au Grand Conseil.    •

Source: Communiqué de presse du gouvernement du canton de Saint-Gall, www.sg.ch du 17/8/09
(Traduction Horizons et débats)